22 novembre 2018
RÉSUMÉ SUCCINCT
Tina, douanière à l’efficacité redoutable, est connue pour son odorat extraordinaire. Mais quand Vore, un homme d’apparence suspecte, passe devant elle, ses capacités sont mises à l’épreuve pour la première fois.
La « frontière » du titre ne désigne pas uniquement un territoire géographique séparant deux pays, cristallisé par le bureau des douanes portuaire où travaille l’héroïne. Car, par le truchement de ses deux personnages principaux, Border transgresse aussi les frontières entre les genres (masculin, féminin – mais aussi cinématographiques) et entre les espèces (humaine, animale, troll), dans un récit hybride où se fondent les codes du film d’auteur hyperréaliste (caméra tenue main à l’appui) avec ceux du drame sentimental, de l’enquête policière et du conte horrifique.

Enfin, le film se situe aussi à la frontière du réel et du surréel : par exemple, malgré son faciès et ses traits physiques fort atypiques, plus proches de ceux du Néandertalien que de l’Homo sapiens, et son sens exacerbé de l’odorat qui lui permet de détecter les passagers tentant de d’enfreindre les lois du pays, le personnage de Tina (très juste Eva Melander, transformée) évolue dans un milieu « normal », et personne dans son entourage ne s’en formalise.
Adapté d’une nouvelle de John Ajvide Lindqvist (également coscénariste, qui avait aussi fourni la matière première au Let the Right One In de Tomas Alfredson, dans lequel il renouvelait le film de vampires), Border cultive un climat d’étrangeté oscillant entre l’onirisme et l’horreur, à l’aide d’images parfois splendides, parfois très troublantes.
C’est toutefois dans l’observation des rapports avec la nature et des comportements ambigus des protagonistes que le réalisateur d’origine iranienne Ali Abassi (auteur d’un premier film, Shelley, inédit au Québec) marque le plus de points. Ainsi en va-t-il, entre autres, des liens qu’entretient Tina avec les animaux sauvages ainsi que des épisodes de sa vie quotidienne avec Roland, son copain un peu trash éleveur de chiens, dans leur petite maison au cœur de la forêt. Mais lorsque l’intrigue bifurque vers une chasse aux pédophiles ou le dévoilement des activités secrètes de Vore, le film perd un peu de son charme de rêve éveillé et bascule davantage dans les méandres du sordide.
Couronné par le jury d’Un Certain Regard à Cannes cette année, Border offre une réflexion sentie sur notre rapport à la normalité, à la beauté ou à la monstruosité – bref, à la différence. Dans cette optique, le film ne peut qu’appartenir à l’époque qui est la nôtre : un monde borderline où cohabitent le bien et le mal, un monde pétri de violence, en quête de sens et d’humanité.
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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : suédois ; s.-t.a.
Gräns
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Réal.
Ali Abbasi
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Genre : Drame fantastiques – Origine : Suède / Danemark
Année : 2018 – Durée : 1 h 50
Dist.
Métropole Films
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Info. @
Cinéma du Parc
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
RÉSUMÉ SUCCINCT
À l’automne 2017, l’Orchestre Métropolitain de Montréal entame sa première tournée internationale dans les plus prestigieuses salles d’Europe. Cette série de concerts se veut le couronnement et le paroxysme de la relation riche qui unit les musiciens et leur chef, Yannick Nézet-Séguin.
Délaissant les taudis de Bidonville : Architectures de la ville future, Jean-Nicolas Orhon rend un vibrant hommage à la musique classique, inspiré par la personnalité de l’incontournable Yannick Nézet-Séguin et son Orchestre Métropolitain. Ensemble se concentre surtout sur l’engouement qui anime le maestro autant que les musiciens. Une chose est certaine, le chef d’orchestre se démarque par sa façon québécoise de se rapprocher de ses acolytes. Magnifique approche qui les motive, les encourage, les situe au même rang social que lui grâce à un langage intelligent, mais sans périphrases inutiles. Lorsqu’on fait des erreurs, le principal intéressé donne des exemples édifiants, terre-à-terre, poussant les limites de l’accessibilité.
Belle leçon de morale. Et puis, la grande surprise. Celle d’une tournée en Europe qui se termine à Paris, séquence émouvante du film. Moment historique pour les musiciens (et pour le chef de musique) qui réalisent que ce concert est, pour la majorité d’entre eux, une affirmation de leur terre d’origine. Et pour Jean-Nicolas Orhon, grâce à une mise en images qui se permet quelques sophistications fort joliment réussies et à l’enthousiasme qui l’anime, c’est ici le témoignage que le documentaire québécois demeure l’un des plus intéressants du monde.

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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : multilingue ; s.-t.f. & s.-t.a.
Ensemble
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Réal.
Jean-Nicolas Orhon
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Genre : Documentaire musical – Origine : Québec [ Canada ]
Année : 2018 – Durée : 1 h 31
Dist.
Les Films du 3 mars
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Info. @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Musée
Cinéma du Parc
Classement
Tous publics
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
RÉSUMÉ SUCCINCT
Quand Tony Lip, un videur du quartier italo-américain du Bronx, est embauché pour conduire Dr Don Shirley, un pianiste noir de calibre mondial, en tournée de concerts de Manhattan jusqu’au sud profond, ils doivent se fier au «livre de Green» manuel qui les guidera vers les rares établissements de l’époque où on acceptait les Afro-américains.
Tiré d’une histoire vraie, Green Book, première réalisation solo de Peter Farrelly, s’avère une agréable surprise, laissant croire que l’aventure individuelle peut parfois porter fruit. Dans une Amérique du début des années 1960, le racisme ordinaire est montré comme une arme à double tranchant qui envenime la société. Comme ces riches influents de la bourgeoisie qui accueillent le pianiste Dr. Don Shirley (très compétent Mahershala Ali, déjà remarqué dans l’excellent Moonlight, de Barry Jenkins) pour divertir les convives, mais n’hésitent pas une seconde pour le radier des mondanités officielles. Film linéaire de par son approche road-movie, Green Book est apprêté d’une mise en scène soignée, riche en observations sociales. L’humour est présent, quoique agrémenté de connotations douces-amères.
Le personnage de Tony Lip, de son vrai nom Frank Anthony Vallelonga est incarné par un Viggo Mortesen impeccable. Personnage d’autant plus étonnant qu’à l’instar de celui du pianiste, il évolue naturellement à mesure que le récit progresse. Un cours épisode indiquant l’orientation sexuelle du protagoniste noir arrêté par des policiers se révèle subtil et sans jugement, provoquant chez le personnage de Tony Lip acceptation et compréhension, confirmé lorsqu’il déclare « Life is complicated / la vie est compliquée ». Portrait d’une époque qui montre les lents soubresauts du changement (appel du pianiste à Kennedy).
Soyons assurés que la carrière de Peter Farrelly prendra un nouveau tournant, plus proche d’un cinéma aux récits socialement affirmatifs plutôt que des comédies gratuitement loufoques. L’époque évoquée est attentive aux détails, donnant au film un air nostalgique bien que, sujet oblige, teinté de cynisme et d’indifférence.

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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : anglais / Version française
Le livre de Green
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Réal.
Peter Farrelly
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Genre : Comédie dramatique – Origine : États-Unis
Année : 2018 – Durée : 2 h 10
Dist.
Les Films Séville
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Info. @
Cineplex
Classement
Tous publics
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
RÉSUMÉ SUCCINT
Thomas, héroïnomane de 22 ans, est envoyé dans une commune en montagne habitée par une vingtaine d’autres jeunes hommes aux prises, comme lui, avec des problèmes de dépendance. L’horaire militaire des corvées est ponctué par la prière, imposée par la maison et le prêtre en résidence, la foi étant le moyen par lequel chaque individu doit trouver son chemin. Un soir, échappant à la vigilance de Pierre, son compagnon de chambre qui a pour mandat de veiller sur lui, le jeune Breton prend la fuite.
Quel beau film que La prière, rappelant un cinéma épuré, voire même limpide tant chaque plan est alimenté d’une idée personnelle qu’on se fait des images en mouvement. C’est ainsi qu’est construite, en général, l’œuvre de Kahn. Depuis l’étonnant Roberto Succo (2001), le cinéaste ne cesse d’explorer les contours de l’âme selon une approche pas si lointaine des frères Dardenne. Une façon unique de cadrer l’image et de le situer dans la nature comme s’il s’agissait de brosser un tableau.
Ici, la foi, et non pas la religion, est assignée au premier rang. Comment la percevoir, être certain que nous l’avons. En forme de voyage initiatique entrepris par Thomas (Anthony Bajon, parfait dans ses antagonismes et prises de conscience), La prière est une autre forme de confession, celle d’un cinéaste (selon nos recherches, aux origines juives) tout à fait conscient des doutes et des merveilles de la chrétienté, particulièrement le catholicisme.
Il se permet de situer ces jeunes en perdition dans une école de réhabilitation sociale par la foi. Est-ce un hasard si dans le groupe, certains d’entre eux paraissent d’origine arabe? D’où, si c’est le cas, ce rapport rassembleur à Dieu, cette communion qui unit les êtres. La parole est présente, le verbe aussi. Le dit sur la foi exprime autant le doute que la certitude. On songe parfois à Alain Cavalier, mais en moins austère. Les Dardenne, déjà évoqués, le sont par le soin apporté aux plans extérieurs où la nature et l’être ne font plus qu’un – voir séquence où Thomas se blesse au genou et après avoir réalisé que ce n’est pas si grave, il sourit avec un air de révélation épiphanique.
Belle complicité entre Cédric Kahn et ses contemporains par le biais d’un questionnement sur la nature complexe du mysticisme et de la croyance. Lorsque des acteurs, dont la plupart des non professionnels, se donnent la peine d’exprimer leurs sentiments avec une force aussi intense que pénétrante, on ne peut qu’admirer ce drame intime qui élève l’âme et situe le cinéma, à raison, au rang des arts.

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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : français
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Réal.
Cédric Kahn
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Genre : Drame biographique – Origine : France
Année : 2017 – Durée : 1 h 47
Dist.
FunFilm
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Info. @
Cinéma Beaubien
Classement
Tous publics
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
RÉSUMÉ SUCCINCT
Mara, une infirmière d’origine roumaine, a quitté son pays pour les États-Unis dans l’espoir d’améliorer sa condition. Au moment d’accueillir Dragos, son fils de 10 ans, elle doit prouver sa bonne foi aux services d’immigration. L’agent responsable de son dossier la presse de questions sur son mariage récent avec Daniel, un Américain qu’elle a connu au centre de réadaptation où elle travaillait alors qu’il se remettait d’un accident.
Après quelques courts sujets et le collectif Contes de l’âge d’or / Amintiri din epoca de aur (TIFF 2009, entre autres), la Roumaine Iona Uricaru signe un premier long métrage multi-géographique (dont le Québec – c’est d’ailleurs en très grande partie tourné à Montréal, incluant une large part d’artisans québécois) mais n’empêche que la jeune cinéaste lui attribue une touche balkanique, comme celle de son compatriote Cristian Mungiu (Baccalauréat / Bacalaureat, de digne mémoire), également un des producteurs du film.
La caméra, souvent proche de la principale protagoniste se révèle un objet documentaire, suivant chaque étape d’une femme perdue dans une Amérique qu’on n’a jamais imaginée., loin de celle de l’American Dream.

L’opportunisme « sexuel » de l’agent d’immigration est montré de façon clinique (dont cette extraordinaire séquence à l’intérieur de l’auto, inquiétante, d’un réalisme à couper le souffle, froide, distancié malgré une caméra organique trop proche des points de contact des corps, et dont l’agressivité fait partie du quotidien, montrant les visages à double face des coupables, sans doute faisant un travail impeccable (au bureau). Dualité de l’Homme, pris entre devoir et sexualité primaire.
Film sur l’immigration, mais aussi sur le rêve américain qui n’a jamais existé mais auquel on croit encore, particulièrement lorsqu’on veut changer son destin quels que soient les risques à prendre. L’errance humaine n’a jamais été aussi chronique qu’à notre époque. Vagues de transferts géographiques qui changent le monde, notre rapport aux autres, à la vie et à nous-mêmes.
Le titre alternatif roumain est Luna de miere (en France, Lune de miel), appellation d’autant plus appropriée qu’elle constitue l’antithèse de cette déclaration et preuve d’amour; également manifesté par la présence de Daniel (excellent Dylan Smith), au passé trouble. La quête de la fameuse « green card » est un sport de combat pour une humanité qui n’a jamais été aussi vulnérable. Le petit Milan Hurduc (Dragoş) est magnifiquement dirigé; et dans la conclusion du film, il participe avec Mara, sa mère (impeccable Mãlina Manovici) dans le film, à un aboutissement digne des films des Dardenne ou de Dumont. Comme si l’exil inéluctable était une forme d’intériorité.
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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : anglais, roumain ; s.-t.a. & s.-t.f.
Limonade / Luna de miere / Lune de miel
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Réal.
Iona Uricaru
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Genre : Drame
Origine
Roumanie / Allemagne / Suède / Québec [ Canada ]
Année : 2018 – Durée : 1 h 28
Dist.
Métropole Films
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Info. @
Cinéma Beaubien
Cineplex
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
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MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. ★ Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]
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RÉSUMÉ SUCCINCT
Dans les années 1990, dans un village du Punjab, un jeune garçon décide de se rendre en ville avec un copain dans le but de trouver l’amour de sa vie. Une époque où les moyens technologiques n’existaient pas et on se débrouillait tant bien que mal.
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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : punjabi ; s.-t.a.
Mairija palēsa
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Réal.
Sunil Thakur
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Genre : Comédie – Origine : Inde
Année : 2018 – Durée : 2 h 16
Dist.
Imtiaz Mastan
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Info. @
Cineplex
Classement
Tous publics
RÉSUMÉ SUCCINCT
Autrefois, au Punjab, il n’y a pas si longtemps, les policiers étaient formés autrement. Aujourd’hui, ce n’est plus pareil car la jeunesse semble être sans but et la motivation absente. Sans parler de la corruption, omniprésente.
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Sortie
Vendredi 23 novembre 2018
Langue(s)
V.o. : punjabi ; s.-t.a.
True Colours of Punjab
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Réal.
Rakesh Mehta
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Genre : Action – Origine : Inde
Année : 2018 – Durée : 2 h 03
Dist.
Imtiaz Mastan
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Info. @
Cineplex
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
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