3 novembre 2017
« Trop »: voilà le mot clé pour commencer à déchiffrer la portée du titre fort énigmatique que porte le plus récent film de Simon Lavoie (Le Torrent, Ceux qui font les révolutions à moitié n’ont fait que se creuser un tombeau). Ce « trop » est à prendre comme un marqueur de l’excès, de ce qui dépasse les limites de l’entendement, de ce qui est difficilement contenable. « Trop » est un indicateur de conséquences à venir, un avertissement. C’est ainsi qu’il faut envisager le visionnement de La petite fille qui aimait trop les allumettes : comme une expérience de l’excès.
Dans le roman sur lequel est adapté ce film situé dans une zone grise entre film d’horreur, drame psychologique et film d’époque, c’est l’inventivité de la plume de son auteur Gaétan Soucy qui parvient à rendre soutenables l’atrocité des événements qui emplissent ses pages. Au contraire, Lavoie révèle au grand jour toute la brutalité que dissimulent les pirouettes de la prose de Soucy. Pour représenter la cruauté que ce dernier ne faisait qu’habillement évoquer, le réalisateur a recours à une palette de techniques qui donnent aux images un air onirique, voire expressionniste. Ce sont ces excès stylistiques — le noir et blanc, les éclairages en clairs-obscurs, les jeux de focales — par lesquels est sublimée l’intensité de la violence dont nous sommes témoins. L’esthétisme nous épargne le choc qu’aurait provoqué une mise en scène naturaliste.
Bien que ces choix de mise en scène rehaussent les aspects fabuleux de l’œuvre et donc de sa portée universelle, quelques subtilités font allusion aux spécificités culturelles québécoises. Parmi celles-ci, l’omniprésence opprimante du catholicisme, tant par ses manifestations déformées au sein des familles que par le rôle social joué par l’Église. C’est en ce sens que se révèle l’originalité de la proposition de La petite fille qui aimait trop les allumettes : en guise de souvenir cauchemardesque d’un passé ancestral. C’est l’image inverse des jolis contes qui idéalisent le Québec d’antan où « tout était plus simple ». En sondant ces vieux tourments refoulés dans l’imaginaire collectif, ce sont les démons somnolents hérités du Québec pré-Révolution tranquille que Lavoie exorcise.
On sort du visionnement de La petite fille qui aimait trop les allumettes ébranlés, choqués, mais certainement pas indifférents. C’est une expérience éprouvante, bourrée d’images et de moments qui prennent aux tripes. Certains le vivront comme une catharsis, d’autres, devant une telle carence d’espoir seront consumés par la morosité. Dans tous les cas, il s’agit de cinéma à point pour la grisaille automnale.
Genre : Drame – Origine : Canada [Québec] – Année : 2017 – Durée : 1 h 51 – Réal. : Simon Lavoie – Int. : Marine Johnson, Antoine L’Écuyer, Jean-François Casabonne, Alex Godbout, Béatrice Aubry, Normand Daoust – Dist. : FunFilm.
Horaires
@ Cinéma Beaubien – Cineplex
Classement
Interdit aux moins de 13 ans
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
Genre : Comédie dramatique – Origine : France – Année : 2017 – Durée : 1 h 47 – Réal. : Olivier Ayache-Vidal – Int. : Denis Podalydès, Léa Drucker, Zineb Triki, Abdoulaye Djallo, Tabono Tandia, Emmanuelle Barrouyer – Dist. : Axia Films.
Horaires
@ Cinéma Beaubien – Cineplex
Classement
Tout public
Genre : Comédie dramatique – Origine : Inde – Année : 2017 – Durée : 2 h 20 – Réal. : Harry Bhatti – Int. : Karamjit Bhatti, Rana Jung Bahadur, Tarsem Jasser, Neeta Mohindra, Sardar Sohi – Dist. : A-Z Films.
Horaires
@ Cineplex
Classement
Tout public
(Déconseillé aux jeunes enfants)
Il pleut des films Marvel comme jadis les films de Frankenstein et de Dracula inondaient les écrans. Les studios Universal et Hammer ont profité de cet engouement pour le monstre de Frankenstein, chacun sur une période de dix-sept ans (huit films de 1931 à 1948 pour le premier, sept films de 1957 à 1974 pour le second). Si la qualité des films était inégale pour Hammer, ceux d’Universal devenaient de plus en plus médiocres avec les années. La quinzaine de films de vampires ou de Dracula de la Hammer ont aussi subi le même sort, entre 1958 et 1974. Jusqu’à présent, Marvel a réussi à maintenir un standard et un contrôle sur une vingtaine de films en dix ans, qui lui permettent de renouveler sa franchise en créant des œuvres qui se démarquent, soit par leur approche avec les Captain America, leur ton avec les Guardians of the Galaxy ou leur audace avec Dr. Strange. La série des Iron-Man et des Avengers deviennent cependant des boursouflures indigestes reposant uniquement sur des effets spéciaux numériques et des scènes d’action interchangeables.
Thor, dieu de la foudre d’Asgard, issu de la mythologie nordique, s’inscrit plutôt mal dans cet univers de super-héros de science-fiction (de même que le docteur Strange, issu du monde mystique). Kenneth Branagh avait réussi avec le premier film à le rendre noble en lui apposant une allure shakespearienne, son père Odin prenant sous la coupe d’Anthony Hopkins la stature d’un Roi Lear tout puissant. Le second opus plongeait dans les ténèbres avec un récit plus convenu. Ce troisième volet verse carrément dans la parodie et la farce, dénaturant autant le personnage que l’univers dans lequel il évolue. Si Thor rit de lui-même, si les scénaristes, le réalisateur et les acteurs se moquent du sujet, comment peut-on prendre au sérieux ce récit décousu, éparpillé et tapageur ?
On y retrouve certes des passages impressionnants qui s’inspirent des meilleurs dessins de Jack Kirby, dont ce combat de titans entre Thor et Hulk s’affrontant comme des gladiateurs dans l’arène de la planète Sakaar, cet affrontement final du tonnerre (jeu de mots assumé) sur le pont d’Asgard au rythme aussi percutant qu’étonnant de la pièce Immigrant Song de Led Zeppelin, ou cette scène hallucinante illustrant au ralenti la déchéance des guerrières Walkaries chevauchant leurs pégases (empruntés à la mythologie grecque) dans un ballet macabre qui rappelle une scène similaire dans The Immortals (2011) de Tarsem Singh.
Pour le reste, on sent que tout le monde s’amuse et que Marvel prépare chemin faisant le prochain Avengers. Thor perd ses cheveux et son marteau, mais il se réconcilie avec son demi-frère Loki et avec Hulk pour exterminer leur sœur Hela (Hé, là !), que Cate Blanchett interprète comme le double négatif de Galadriel dans The Lord of the Rings : une déesse de la mort qui assurera la destruction d’Asgard et d’Odin. On fait le ménage et on recommence avec la Phase IV du studio, qui va s’enclencher en 2020 après la sortie des deux Avengers : Infinity War. Personnellement, je préfère toujours le modeste Phase IV (1974) de Saul Bass, un vrai film de science-fiction extrapolant sur un danger beaucoup plus effrayant (une colonie de fourmis super-résistantes) que tous les extraterrestres de l’univers.
Genre : Aventures fantastiques – Origine : États-Unis – Année : 2017 – Durée : 2 h 11 – Réal. : Taika Waititi – Int. : Chris Hemsworth, Cate Blanchett, Tom Hiddleston, Mark Ruffalo, Benedict Cumberbatch, Idris Elba – Dist. : Buena Vista Canada.
Horaires
@ Cineplex
Classement
Tout public
(Déconseillé aux jeunes enfants)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
26 octobre 2017
Genre : Comédie dramatique– Origine : Inde – Année : 2017 – Durée : 2 h 20 – Réal. : Param Shiv – Int. : Ranjit Bawa, J. Brandon Hill, R. Bhakti Klein, Karmajit Anmol, Navpreet Banga– Dist. : Roadside Pictures.
Horaires
@ Cineplex
Classement
Tout public
Genre : Suspense psychopathologique – Origine : États-Unis / Canada – Année : 2017 – Durée : 1 h 34 – Réal. : Michael Spierig, Peter Spierig – Int. : Matt Passmore, Callum Keith Rennie, Clé Bennett, Tobin Bell, Britanny Allen, Laura Vandervoot – Dist. : Les Films Séville.
Horaires
@ Cineplex
Classement
Interdit aux moins de 16 ans
(Violence / Horreur)
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