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De rouille et d’os

9 novembre 2012

À CORPS PERDUS

Quelle belle chose de constater, autant pour le public que pour les critiques, que certains cinéastes font leur « meilleur film » à chaque nouvelle proposition. C’est bien le cas de Jacques Audiard qui, après l’édifiant et magnifique Un prophète, surprend de mille et une façons avec De rouille et d’os. Film primaire, concret, où le corps est ominiprésent, filmé avec religiosité, emportement et totalité.

>> Élie Castiel

Ce corps, c’est celui de Matthias Schoenaerts, révélé dans Bullhead, entier, robuste, rayonnant de virilité. Et ici, bien plus encore, véritable Goliath parmi les humains. Ce qui frappe davantage, pourtant, c’est qu’il n’en est pas tout à fait conscient ; c’est ce qui lui donne sans doute ce naturel dévastateur. Et c’est sans doute ainsi que Jacques Audiard l’a voulu. Le cinéaste filme le corps masculin avec une palette charnelle, pleine de sensualité, rarement aussi formidablement exprimée au cinéma.

Ce côté organique du film est confirmé dès le début, alors que nous regardons avancer, dans une rue, sur une route, un homme massif et son fils, le géant et l’enfant, une image qui donne le ton à De rouille et d’os, incontestablement l’une des plus belles surprises de l’année en termes de cinéma international.

C’est au sud de la France, au milieu d’un paysage ensoleillé que l’homme, Ali, débarque à l’improviste, donnant à voir son immense carcasse occultant un cœur tendre. Il y a là un sentiment de déjà-vu; ce que fait Audiard, pourtant, dépasse infiniment les clichés habituels. Il offre une adaptation littéraire libre et d’une grande force d’écriture.

Texte complet : Séquences (nº 281, p. 41-44)

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