Recensions

Tambour battant, mémoires de Volker Schlöndorff

16 juin 2010

Michel Euvrard

Né en 1939, orphelin de mère à quatre ans, père médecin, Schlöndorff vit une enfance et une adolescence assez libres dans l’Allemagne d’après-guerre : l’école fermée, les GI, le marché noir… L’été, il travaille sur des chantiers de construction.

Il décroche un séjour de trois mois en Bretagne, en internat chez les Jésuites; au ciné-club, il voit Nuit et Brouillard : « Comment cela a-t-il été possible ? presque tous mes films, de Törless au Neuvième Jour, cherchent la réponse ».

Il revient en France à la rentrée 1956, alors que le débat fait rage sur les évènements en Hongrie, fréquente de jeunes Marocains (qui joueront dans son premier film, La Main rouge, court métrage sur la chasse aux Algériens déserteurs de l’armée française en Allemagne). Il devient l’ami de Bertrand Tavernier.

En vacances en Allemagne, il rencontre Fritz Lang qui tourne à Berlin Le Tombeau hindou et Le Tigre du Bengale.

De retour à Paris, il suit le cours de préparation à l’HIDEC de Henri Agel et fréquente la Sorbonne; à la cinémathèque de la rue d’Ulm, il fait la connaissance de Lotte Heisner qui l’engage comme interprète des films allemands. Il y complète son éducation cinématographique et passe le concours de l’HIDEC.

Par Roger Nimier, ami des Tavernier, il rencontre Louis Malle qui prépare Zazie dans le métro; il l’accompagne en Algérie en vue de l’adaptation du roman La Grotte de Georges Buis, mais le film ne se fait pas.

Après la mort de Nimier, Malle entreprend un scénario sur un suicidé, d’après Le Feu Follet de Drieu La Rochelle; au cours du tournage, Schlöndorff rencontre Suzanne Baron, qui montera Feu de paille, Le Tambour, Le Faussaire.

Tambour battant continue sur ce rythme, en courts chapitres, avec toujours des rencontres, des anecdotes, des portraits — de cinéastes, ses collègues de la Nouvelle Vague allemande, Margarethe Von Trotta, qui jouera dans Le Coup de grâce (1976), avec qui il coréalisera Feu de Paille (1972) et L’Honneur perdu de Katharina Blum (1975), et qu’il épousera; d’écrivains, ceux en particulier dont il adapte les œuvres, Heinrich Böll (Katharina Blum), Gunther Grass (Le Tambour), Arthur Miller (Mort d’un commis voyageur), Max Frisch (The Voyager). Il fait également le récit des tournages, dans différents pays, aux États-Unis (A Gathering of Old Men), au Liban (Le Faussaire), et jusqu’au Kazakhstan (Ulzhan), celui des six années à la direction de Babelsberg…

Schlöndorff évoque aussi sa vie personnelle, ses amours et surtout ses amitiés; il sait être émouvant pour décrire, par exemple, les derniers moments de Max Frisch. Tambour battant est un livre vivant, intelligent, instructif; il comporte des index : des films et des mises en scène de Schlöndorff, des autres films cités, des noms de personnes, mais l’éditeur a laissé subsister quelques fautes d’orthographe et d’accord et des erreurs de noms propres : Franju y est prénommé Pierre !

Le syndicat français de la critique a attribué à Tambour battant le Prix du meilleur livre étranger du cinéma.

Tambour battant. Mémoires de Volker Schlöndorff | Volker Schlöndorff, traduit par Jeanne Etoré et Bernard Lortholary | Paris : Flammarion, 2009 | 427 pages

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