En salle

The Congress

27 août 2014

En quelques mots

Texte : Guillaume Potvin
Cote :  ★★★  1/2

À mille lieues des spéculations populaires sur l’avenir du cinéma – expériences sensorielles, d’interactivité ou même de réalité virtuelle –, le scénario de Folman imagine un cinéma qui sera parvenu à échapper non seulement aux contraintes bidimensionnelles de l’écran, mais aussi aux paradigmes traditionnels du mode de représentation institutionnel.

Les spectateurs ne vivent plus les films individuellement, mais les habitent collectivement et, paradoxalement, ne voient plus les mêmes films, les récits étant désormais configurés individuellement pour chaque spectateur. L’hypothèse de Folman, aussi insolite soit-elle, trace de nouvelles pistes de réflexion. Et si la visée du progrès technologique au cinéma n’était pas l’atteinte d’un réalisme absolu, mais bien d’un divertissement absolu ? Cette diversion ne serait-elle pas l’ultime outil de contrôle social ? Le cinéma total dont rêvait André Bazin se révélerait-il être en fait un cauchemar ?

Cette soudaine incursion en terrain pharmacopunk est surprenante et fort fructueuse sur le plan spéculatif, mais se fait au détriment de la trame narrative de Robin Wright qui s’y égare. Sur fond de lutte de classes, elle tentera de retrouver son fils dans une utopie synthétique. Cette recherche la mènera à une révélation grossière, digne de They Live (1988) ou The Matrix (1999).

Si cette dictature pharmacologique s’inscrit dans la même tradition que celles de Ray Bradbury, Aldous Huxley et Philip K. Dick (ayant toutes recours aux drogues comme outils de contrôle social), l’originalité de cette adaptation réside dans sa façon de détourner le sens critique de Lem vers des problématiques plus près de notre expérience. Comme Slavoj Žižek et Christian Metz avant lui, The Congress démontre comment l’institution cinématographique est véhicule d’idéologie. En ce sens, le scénario de Folman décèle dans les pratiques capitalistes contemporaines des échos des apories aberrantes qu’aura constatées l’auteur polonais sous le stalinisme. Aussi insolites que puissent paraître les technologies fictives que Robin Wright rencontre, leurs fondements se trouvent en nos pratiques actuelles.

Sortie : Vendredi 29 août 2014
V.o. : Anglais
S.-t.f. – Le Congrès / Kennes ha’atidanim

Genre : Animation / Drame | Origine : Israël / Allemagne / Pologne / Luxembourg / France / Belgique – Année : 2013 – Durée : 2 h 02 – Réal. : Ari Folman– Int. : Robin Wright, Harvey Keitel, Jon Hamm, Paul Giamatti, Danny Huston, Sami Gayle – Dist. / Contact : EyeSteelFilm | Horaires / Versions / Classement : Cineplex – Excentris

MISE AUX POINTS
★★★★★ (Exceptionnel) ★★★★ (Très Bon) ★★★ (Bon) ★★ (Moyen) (Mauvais) 1/2 (Entre-deux-cotes) – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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