22 mars 2018
RÉSUMÉ SUCCINCT
Anne réalise que treize convives seront présents au souper mondain qu’elle prépare dans sa luxueuse résidence parisienne. Afin de corriger cette fausse note, elle demande à sa bonne, Maria, de se joindre au groupe en dissimulant sa véritable identité.
Dans son plus récent film, Amanda Sthers pose, une fois de plus, son regard sur les relations interpersonnelles. Si avec Je vais te manquer (2009), la réalisatrice française s’intéressait au croisement de six destinées, Madame explore le destin croisé de divers personnages, dans le contexte d’un dîner mondain. Alors qu’Anne (Toni Collette), fortunée américaine, s’apprête à donner un grand souper bourgeois dans sa demeure parisienne, elle apprend qu’un treizième couvert est posé à table pour Steven, le fils du premier mariage de Bob (Harvey Keitel), son époux. Superstitieuse, elle désire à tout prix un quatorzième invité pour conjurer le mauvais sort. Cette prémisse scénaristique, plutôt faible pour motiver l’action, engendrera pourtant les péripéties de Madame, puisque la domestique Maria (Rossy de Palma), prendra place à la table, sans dévoiler le secret de son identité.
Si Rossy de Palma incarne à merveille la domestique décalée de son milieu, amenant quelques situations cocasses, le dîner n’égale en rien celui orchestré par Francis Veber (Le dîner de cons, 1998). La mascarade continue bien après le repas, alors que David, un expert en art issu de la noblesse britannique tombe sous le charme de la domestique espagnole. Ainsi, le film se concentre sur les relations amoureuses et interpersonnelles, caractérisées par les non-dits identitaires et relationnels, au sein du couple (improbable) formé de Maria et David, mis en parallèle avec celui d’Anne et Bob, le couple mondain.
Critique sociale du capitalisme, mise en scène du fait de la mascarade identitaire du dîner et de ses superficialités bourgeoises, Madame ne propose cependant pas une trame narrative nouvelle, mais une situation maintes fois explorée dans le cinéma (français). D’ailleurs, dans Venise sous la neige (2017), Elliott Covrigaru avait récemment usé de la mascarade identitaire, lors d’un dîner. Cela dit, Madame vaut pour le jeu des actrices et la mise en scène de deux femmes qui semblent, a priori, aux antipodes : Toni Collette incarne la femme mondaine et blasée, à la fois autoritaire et maternelle, qui manque de confiance, bien qu’elle doive l’incarner, alors que Rossy de Palma (au physique atypique, mais charismatique à souhait) est l’immigrée à la confiance tranquille travaillant d’arrache-pied pour subvenir aux besoins de sa fille, tout en rêvant du prince charmant. Certes, très différentes, ces deux femmes représentent à la fois plusieurs femmes et se rejoignent dans leurs oppressions communes : le fait d’être femme et de devoir constamment négocier leurs identités, selon les caprices du patriarcat. Bien que Madame aurait gagné à déclencher davantage de rires afin de mettre la table pour les systèmes qu’il dénonce, le film propose une critique douce-amère de nos sociétés capitalistes.
Réalisation
Amanda Sthers
Genre : Comédie dramatique – Origine : France– Année : 2017 – Durée : 1 h 31 – Dist. : TVA Films.
Horaires & info.
@ Cineplex
Classement
Tout public
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]
RÉSUMÉ SUCCINCT
Katie Price, 17 ans, souffre d’une rare maladie qui l’oblige à rester chez elle pendant la journée, surtout lorsqu’exposée au soleil. Sa vie va changer le jour où un jeune homme qui l’observe depuis qu’il est petite par la fenêtre de sa chambre, décide d’aller la voir.
Réalisation
Scott Speer
Genre : Mélodrame – Origine : États-Unis – Année : 2017 – Durée : 1 h 33 – Dist. : Les Films Séville.
Horaires & info.
@ Cineplex
Classement
Tout public
RÉSUMÉ SUCCINCT
En Afghanistan, Salim Shaheen est un phénomène. Malgré le conflit, il tourne de nombreux films qui évoquent ceux de Bollywood. La production du film est allée à sa rencontre afin qu’il puisse révéler ce qui se cache derrière son succès.
Salim Shaheen est un grand tchatcheur de la bonne espèce, c’est-à-dire qu’il a du bagou à en revendre, une extraordinaire facilité à parler de soi, uniquement de soi, hallucinante. Si faramineuse, qu’on se prend à l’aimer. Car l’individu est aussi puéril, criard, extrême et aussi mauvaisement bon que ses films, dont les influences d’un Bollywood à la sauce indigeste des années 70 se traduisent dans ses films, mélange d’action, de chansons et de danses, plus ou moins lascives.
Il est entouré d’une équipe qui l’adule, y compris l’effeminé de services tradition oblige, marié de surcroît (à une femme, bien sûr) et avec enfants. Mais il ne semble heureux que quand il est obligé de jouer le rôle d’une mère. Une des plus belles scènes du film qui illustre l’hypocrisie sexuelle de cette partie du monde.
Sonia Kronlund, qui parle leur langue assez pour se débrouiller, même de façon plus que confortable, n’a pas seulement signé un documentaire d’une drôlerie irrésistible, mais a choisi l’un des plus dangereux endroits du monde où l’étranger (et encore plus les résidents) est constamment entre la vie et la mort.
Le film est une leçon de résistance, d’engagement politique et universaliste, et dans le même temps la revendication d’un cinéma populaire qui n’a d’autre mission que de divertir au degré zéro de l’intelligence. Et puis quoi, il n’est pas le seul !
Mais à voir le visage de ces spectateurs (que des hommes, encore une fois, tradition oblige) figés devant un écran artisanal mal ajusté, regarder sans broncher des héros improbables se casser la gueule entre eux, cela devient bouleversant, attendrissant même. Ces gestes pleins de foi du visage et de béatitude des yeux qui croient fermement en ce qu’ils voient, en disent long sur le rapport entre l’écran et les spectateurs.
Et pour Kronlund (considéré par l’équipe afghane, comme un « gars parmi eux »), c’est surtout la réalisation d’un très beau projet, une proposition unique en son genre, porteuse de mille et une interrogations sur les images en mouvement et ce qu’on peut se permettre ou pas de filmer. Pour Shaheen, le héros de ce beau récit, c’est filmer tout simplement ou ne plus exister. Pour nous, c’est reconnaître que le cinéma est un art du possible, c’est-à-dire, vivant.
Réalisation
Sonia Kronlund
Genre : Documentaire – Origine : France / Italie / Allemagne – Année : 2017 – Durée : 1 h 25 – Dist. : FunFilm.
Horaires & info.
@ Cinéma du Parc – Cinémathèque québécoise
Classement
Tout public
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]
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