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Green Book

22 novembre 2018

| PRIMEUR |
Semaine 47
Du 23 au 29 novembre 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
Quand Tony Lip, un videur du quartier italo-américain du Bronx, est embauché pour conduire Dr Don Shirley, un pianiste noir de calibre mondial, en tournée de concerts de Manhattan jusqu’au sud profond, ils doivent se fier au «livre de Green» manuel qui les guidera vers les rares établissements de l’époque où on acceptait les Afro-américains.

 CRITIQUE
| Élie Castiel |

★★★

SUR LA ROUTE

Tiré d’une histoire vraie, Green Book, première réalisation solo de Peter Farrelly, s’avère une agréable surprise, laissant croire que l’aventure individuelle peut parfois porter fruit. Dans une Amérique du début des années 1960, le racisme ordinaire est montré comme une arme à double tranchant qui envenime la société. Comme ces riches influents de la bourgeoisie qui accueillent le pianiste Dr. Don Shirley (très compétent Mahershala Ali, déjà remarqué dans l’excellent Moonlight, de Barry Jenkins) pour divertir les convives, mais n’hésitent pas une seconde pour le radier des mondanités officielles. Film linéaire de par son approche road-movie, Green Book est apprêté d’une mise en scène soignée, riche en observations sociales. L’humour est présent, quoique agrémenté de connotations douces-amères.

L’époque évoquée est attentive aux détails, donnant  au film  un air
nostalgique bien que, sujet oblige, teinté de cynisme et d’indifférence.

Le personnage de Tony Lip, de son vrai nom Frank Anthony Vallelonga est incarné par un Viggo Mortesen impeccable. Personnage d’autant plus étonnant qu’à l’instar de celui du pianiste, il évolue naturellement à mesure que le récit progresse. Un cours épisode indiquant l’orientation sexuelle du protagoniste noir arrêté par des policiers se révèle subtil et sans jugement, provoquant chez le personnage de Tony Lip acceptation et compréhension, confirmé lorsqu’il déclare « Life is complicated / la vie est compliquée ». Portrait d’une époque qui montre les lents soubresauts du changement (appel du pianiste à Kennedy).

Soyons assurés que la carrière de Peter Farrelly prendra un nouveau tournant, plus proche d’un cinéma aux récits socialement affirmatifs plutôt que des comédies gratuitement loufoques. L’époque évoquée est attentive aux détails, donnant au film un air nostalgique bien que, sujet oblige, teinté de cynisme et d’indifférence.

Sortie
Vendredi 23 novembre 2018

Langue(s)
V.o. : anglais / Version française
Le livre de Green

Réal.
Peter Farrelly

Genre : Comédie dramatique – Origine : États-Unis
 Année : 2018 – Durée : 2 h 10
Dist.
Les Films Séville

Info. @
Cineplex

Classement
Tous publics

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen.Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]

La prière

| PRIMEUR |
Semaine 47
Du 23 au 29 novembre 2018

RÉSUMÉ SUCCINT
Thomas, héroïnomane de 22 ans, est envoyé dans une commune en montagne habitée par une vingtaine d’autres jeunes hommes aux prises, comme lui, avec des problèmes de dépendance. L’horaire militaire des corvées est ponctué par la prière, imposée par la maison et le prêtre en résidence, la foi étant le moyen par lequel chaque individu doit trouver son chemin. Un soir, échappant à la vigilance de Pierre, son compagnon de chambre qui a pour mandat de veiller sur lui, le jeune Breton prend la fuite.

 CRITIQUE
| Élie Castiel |

★★★★

LA FOI

Quel beau film que La prière, rappelant un cinéma épuré, voire même limpide tant chaque plan est alimenté d’une idée personnelle qu’on se fait des images en mouvement. C’est ainsi qu’est construite, en général, l’œuvre de Kahn. Depuis l’étonnant Roberto Succo (2001), le cinéaste ne cesse d’explorer les contours de l’âme selon une approche pas si lointaine des frères Dardenne. Une façon unique de cadrer l’image et de le situer dans la nature comme s’il s’agissait de brosser un tableau.

Ici, la foi, et non pas la religion, est assignée au premier rang. Comment la percevoir, être certain que nous l’avons. En forme de voyage initiatique entrepris par Thomas (Anthony Bajon, parfait dans ses antagonismes et prises de conscience), La prière est une autre forme de confession, celle d’un cinéaste (selon nos recherches, aux origines juives) tout à fait conscient des doutes et des merveilles de la chrétienté, particulièrement le catholicisme.

 Lorsque des acteurs, dont la plupart des non professionnels, se donnent
la peine d’exprimer leurs sentiments avec une force aussi intense
que pénétrante, on ne peut qu’admirer ce drame intime
qui élève l’âme et situe le cinéma, à raison, au rang des arts.

Il se permet de situer ces jeunes en perdition dans une école de réhabilitation sociale par la foi. Est-ce un hasard si dans le groupe, certains d’entre eux paraissent d’origine arabe? D’où, si c’est le cas, ce rapport rassembleur à Dieu, cette communion qui unit les êtres. La parole est présente, le verbe aussi. Le dit sur la foi exprime autant le doute que la certitude. On songe parfois à Alain Cavalier, mais en moins austère. Les Dardenne, déjà évoqués, le sont par le soin apporté aux plans extérieurs où la nature et l’être ne font plus qu’un – voir séquence où Thomas se blesse au genou et après avoir réalisé que ce n’est pas si grave, il sourit avec un air de révélation épiphanique.

Belle complicité entre Cédric Kahn et ses contemporains par le biais d’un questionnement sur la nature complexe du mysticisme et de la croyance. Lorsque des acteurs, dont la plupart des non professionnels, se donnent la peine d’exprimer leurs sentiments avec une force aussi intense que pénétrante, on ne peut qu’admirer ce drame intime qui élève l’âme et situe le cinéma, à raison, au rang des arts.

Sortie
Vendredi 23 novembre 2018

Langue(s)
V.o. : français

Réal.
Cédric Kahn

Genre : Drame biographique – Origine : France
 Année : 2017 – Durée : 1 h 47
Dist.
FunFilm

Info. @
Cinéma Beaubien

Classement
Tous publics
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]

Lemonade

| PRIMEUR |
Semaine 47
Du 23 au 29 novembre 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
Mara, une infirmière d’origine roumaine, a quitté son pays pour les États-Unis dans l’espoir d’améliorer sa condition. Au moment d’accueillir Dragos, son fils de 10 ans, elle doit prouver sa bonne foi aux services d’immigration. L’agent responsable de son dossier la presse de questions sur son mariage récent avec Daniel, un Américain qu’elle a connu au centre de réadaptation où elle travaillait alors qu’il se remettait d’un accident.

 CRITIQUE
| Élie Castiel |

★★★ ½

EXIL INTÉRIEUR

Après quelques courts sujets et le collectif Contes de l’âge d’or / Amintiri din epoca de aur (TIFF 2009, entre autres), la Roumaine Iona Uricaru signe un premier long métrage multi-géographique (dont le Québec – c’est d’ailleurs en très grande partie tourné à Montréal, incluant une large part d’artisans québécois) mais n’empêche que la jeune cinéaste lui attribue une touche balkanique, comme celle de son compatriote Cristian Mungiu (Baccalauréat / Bacalaureat, de digne mémoire), également un des producteurs du film.

La caméra, souvent proche de la principale protagoniste se révèle un objet documentaire, suivant chaque étape d’une femme perdue dans une Amérique qu’on n’a jamais imaginée., loin de celle de l’American Dream.

L’opportunisme « sexuel » de l’agent d’immigration est montré de façon clinique (dont cette extraordinaire séquence à l’intérieur de l’auto, inquiétante, d’un réalisme à couper le souffle, froide, distancié malgré une caméra organique trop proche des points de contact des corps, et dont l’agressivité fait partie du quotidien, montrant les visages à double face des coupables, sans doute faisant un travail impeccable (au bureau). Dualité de l’Homme, pris entre devoir et sexualité primaire.

Film sur l’immigration, mais aussi sur le rêve américain qui n’a jamais existé mais auquel on croit encore, particulièrement lorsqu’on veut changer son destin quels que soient les risques à prendre. L’errance humaine n’a jamais été aussi chronique qu’à notre époque. Vagues de transferts géographiques qui changent le monde, notre rapport aux autres, à la vie et à nous-mêmes.

Un aboutissement digne des films des Dardenne ou de Dumont.
Comme si l’exil inéluctable était une forme d’intériorité.

Le titre alternatif roumain est Luna de miere (en France, Lune de miel), appellation d’autant plus appropriée qu’elle constitue l’antithèse de cette déclaration et preuve d’amour; également manifesté par la présence de Daniel (excellent Dylan Smith), au passé trouble. La quête de la fameuse « green card » est un sport de combat pour une humanité qui n’a jamais été aussi vulnérable. Le petit Milan Hurduc (Dragoş) est magnifiquement dirigé; et dans la conclusion du film, il participe avec Mara, sa mère (impeccable Mãlina Manovici) dans le film, à un aboutissement digne des films des Dardenne ou de Dumont. Comme si l’exil inéluctable était une forme d’intériorité.

Sortie
Vendredi 23 novembre 2018

Langue(s)
V.o. : anglais, roumain ; s.-t.a. & s.-t.f.
Limonade / Luna de miere / Lune de miel


Réal.
Iona Uricaru

Genre : Drame
Origine
Roumanie / Allemagne / Suède / Québec [ Canada ]
Année : 2018 – Durée : 1 h 28
Dist.
Métropole Films

Info. @
Cinéma Beaubien
Cineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]

 

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