23 février 2017
RÉSUMÉ SUCCINCT
En 1945, après cinq années d’Occupation, des millions de mines restent actives sous les plages du Danemark. Un groupe de jeunes soldats allemands défaits est retenu de force au pays pour entreprendre la périlleuse opération de nettoyage.
Ici, ce n’est pas la guerre, mais l’après, où des soldats-gamins allemands prisonniers au Danemark sont chargés de déminer les côtes nationales. Ils sont ahuris, perdus dans un microcosme dangereux, ne sachant rien de la Convention de Genève datant de 1929, interdisant d’obliger des prisonniers de guerre à effectuer de lourdes taches, particulièrement lorsqu’elles s’avèrent dangereuses. Dans cet endroit coupé du monde, le mot d’ordre est la vengeance, quelle que soit le visage qu’elle présente et sur qui elle dresse ses griffes.
Magnifiquement filmé, dans un Cinémascope qui octroie à l’horreur ses plus ignobles interstices et où la tragédie s’oppose à la fausse sérénité des lieux, Les oubliés est un récit qui culmine vers le dur et long chemin de la rédemption. Malgré les apparences, ni vainqueurs, ni vaincus. Simplement, une vision de l’Allemagne de la fin de la Seconde Guerre mondiale, différente de celle que nous avons l’habitude de voir. Ces jeunes soldats, savaient-ils ce qu’ils faisaient ? Étaient-ils d’accord avec la politique établie ? Pour sauver leur peau, ne faisaient-ils qu’obéir aux ordres ?
À ces questions existentielles, Martin Zandvliet n’y répond pas dans ce troisième long métrage d’une puissance qui pousse le spectateur à repenser ses idéaux. Manipulateur ? Peut-être. Révisionniste ? Certainement pas. Mais fortement poussé par un désir de déconstruire l’Histoire en présentant l’individu dans toute son humanité.
Pour illustrer cette proposition, il fait appel à l’acteur danois Roland Møller, forte gueule, carrure de casse-gueule, mais en même temps armé d’une force intérieure qui le pousse à finalement extérioriser ses émotions à l’état brut.
La mise en scène, limpide, épurée, sans effets gratuits (même si certains spectateurs seront mal à l’aise face à quelques effets graphiques insupportables) reproduit une certaine réalité, souvent cachée, de l’aventure humaine. Et en concentrant l’objectif de la caméra sur les personnages (tous les jeunes, excellents) plutôt que sur le récit, le cinéaste rallie sa proposition : les fils tendus entre la haine et le pardon, entre le mépris et la déférence, entre le chagrin et la pitié, entre vivre et se laisser mourir.
Réaliste, sensoriel, grave, triste et lourdement interrogateur, Les oubliés s’incruste dans le fort intérieur des êtres pour en retirer les mystères les plus cachés, ceux de l’âme et de la conscience.
Genre : DRAME DE GUERRE – Origine : Danemark / Allemagne – Année : 2015 – Durée : 1 h 41 – Réal. : Martin Zandvliet – Int. : Roland Møller, Louis Hoffmann, Joel Basman, Mikkel Følfgaard, Emile Belton, Oskar Belton – Dist./Contact : Métropole.
Horaires : @ Cinéma Beaubien – Cineplex
CLASSEMENT
Interdit aux moins de 13 ans
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
RÉSUMÉ SUCCINCT
Durant la Seconde Guerre Mondiale, un trio amoureux composé d’une femme et de deux hommes, tous les deux fort épris d’elle, traverse la vie avec tout ce que cela implique comme joies, douleurs et désagréments.
Bande-annonce sans sous-titres
Signataire, entre autres, de l’intrigant et très beau 7 Khoon Maaf / Seven Sins Forgiven (2011), et de l’excellente adaptation du Hamlet de Shakespeare, Haider (2014), le premier programmé à Berlin la même année et le second en 2015 au Hambourg Film Festival, Vishal Bhardwaj opte cette fois-ci pour le rôle de l’Inde au cours de la Seconde Guerre mondiale. C’est la toile de fond de Rangoon, oscillant entre le triangle amoureux, le discours politique et les codes chants/danses de la recette bolywoodienne. Cette dernière option se calque cependant aux films tournés à cette époque, un milieu des années 1940 où les Britanniques dominent encore le territoire national et où les films hindous demeurent le divertissement par excellence d’une population qui ne rêve que d’indépendance, grâce notamment aux pouvoir d’un Gandhi contre la révolte aggressive, croyant aux pouvoirs des mots.
Dans un pays qui annonce quotidiennement une transition inéluctable, le pouvoir rebelle s’allie à l’Allemagne, l’Italie et autres ennemis des Alliés. Controverse historique mais nécessaire pour un pays qui ne pense qu’à avoir le pouvoir entre ses mains. Ce côté, le cinéaste le montre avec une subtilité rassurante, démontrant ainsi que dans chaque conflit, les loyautés sont parfois contradictoires et se montrent sans alternatives face aux pays prônant la liberté.
Parallèlement, le cinéma de l’époque est brillamment mis en relief sous les traits du personnage du producteur Rustom (excellent, comme toujours, Saif Ali Khan) et de Julia (versatile Kangana Ranaut). On soulignera la virilité bien placée du secrètement impliqué Nawab Malik (Shahid Kapoor, qui mérite hautement une carrière internationale) dans la controversée INA (Indian National Army) de 1942, l’homme et le mouvement montrés comme des héros nationaux. Historiquement, mais pas illustré dans Rangoon, Subhash Chandra Bose, n’avait-il pas formé le contingent indien de la Waffen SS ? Après le conflit mondial, l’INA de l’époque sera sévèrement réprimandée, suscitant, encore aujourd’hui, le discours politique indien. Le genre Bollywood ne cesse de nous surpendre.
Genre : DRAME HISTORIQUE – Origine : Inde – Année : 2017 – Durée : 2 h 33 – Réal. : Vishal Bhardwaj – Int. : Kangana Ranaut, Shahid Kapoor, Saif Ali Khan, Richard McCabe, Alex Avery, Satoru Kawaguchi – Dist./Contact : Imitiaz Mastan.
Horaires : @ Cineplex
CLASSEMENT
Interdit aux moins de 13 ans
(Violence)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
RÉSUMÉ SUCCINCT
Sorti du couvent, Jeanne ne désire que connaître l’amour, le vrai, le fidèle. Elle le trouve auprès de Julien, qu’elle vient de rencontrer. Mais pour Jeanne, le quotidien se transforme bientôt en cauchemar pour diverses raisons. Cela se passe en Normandie, en 1819.
En 1958, Alexandre Astruc proposait une version romantique du premier roman de Guy de Maupassant datant de 1883. Avec Maria Schell, Christian Marquand et Pascale Petit comme principaux comédiens, il pouvait s’assurer que les règles d’interprétation de l’époque étaient suivies à la lettre. Pari réussi pour Une vie, un film langoureux, charmant et dont la dramaturgie nous laissait un pincement au cœur. Cinéaste rarrissime, quelques longs métrages pour le cinéma, pour ensuite une conversion au petit écran, Astruc n’a pas vraiment participé à la Nouvelle Vague émergente qui allait presque tout raser dans la mouvance cinématographique hexagonale.
Après le magnifique La loi du marché, dont nous avons dit tout le bien, Stéphane Brizé s’attaque à un auteur important de la littérature en prenant le risque de déconstruire son roman par le biais de l’ascèse, cette tendance à construire l’œuvre selon une approche esthétique, cadrant le plan comme s’il s’agissait d’un livre qu’on feuillette et qui prend une forme cinématographique grâce à une caméra à l’épaule, dont le travail rigoureux d’Antoine Héberlé stupéfie plutôt que de séduire. Tout se passe pour que le spectateur savoure ces instants réduits à l’état de pur intellect, naviguant intentionnellement entre des eaux troubles et des temps presque immobiles où l’art de la peinture s’exprime avec exultation.
Ici, Brizé ne se contente pas de paraître, mais au contraire, signe une œuvre justement honorée du Prix Louis Delluc l’an dernier. Pour sa détermination à moderniser un récit du 19e siècle en une histoire d’amour presque d’aujourd’hui. L’émotion, la larmoyante, la manipulatrice est ici transformée en une sensation qu’on retient sur soi, à la limite clinique, intransigeante, laissant quelques spectateurs étonnés devant une telle proposition.
Tout compte fait, Une vie, le film de Stéphane Brizé, est une proposition nette et sincère à lire le cinéma tout en tenant compte de la fonction du regard, ici totalement placé au rang de la pensée, de la réflexion, du sous-entendu ; car fidèle aux tableaux évoqués, aux lieux minutieusement choisis et à la nature quasi chimérique que le film croise, le résultat est un exploit impeccable entre le cinéma et la littérature, deux disciplines qui se croisent et cohabitent comme par enchantement.
Et puis une actrice, Judith Chamla, obsédée par son personnage, combattante face à une société inventée par Maupassant et que Brizé réorganise pour les besoins de la comédienne. Pour qu’elle s’identifie à l’époque tout en préservant une approche contemporaine. Troublante, séduisante, habitée, Chamla transperce l’écran tout en le préservant de possibles blessures. Les autres comédiens l’entourent avec un sens inné de la complicité ; on soulignera la présence d’une Yolande Moreau extraordinairement versatile.
La passion, la séduction, le corps même, le drame et la tragédie sont au service du cinéma, art par excellence de la représentation. Brizé l’a parfaitement compris en mettant à notre disposition un étrange et nouveau dispositif cinématographique. Pour cette héroïne sortie du couvent, le désenchantement et la trahison sont des parcours d’une vie que Brizé illustre avec une approche minimaliste qui tient du mystique et du contemplatif.
Genre : DRAME – Origine : Français / Belgique – Année : 2016 – Durée : 1 h 59 – Réal. : Stéphane Brizé – Int. : Judith Chemla, Jean-Pierre Darroussin, Yolande Moreau, Swann Arlaud, Nina Meurisse, Finnegan Oldfield – Dist./Contact : MK2/Mile End.
Horaires : @ Cinéma Beaubien – Cineplex
CLASSEMENT
Tout public
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
16 février 2017
RÉSUMÉ SUCCINCT
Sur la trace de son patron dans un centre de bien-être, quelque part en Suisse, un jeune cadre devient la proie des dirigeants de l’établissement qui proposent à leurs clients des méthodes de soins inusités.
Gore Verbinski adore le cinéma de genre : horreur (The Ring), pirates (les trois premiers Pirates of the Caribbean), animation (Rango), western (The Lone Ranger), ce dernier film ayant coûté les yeux de la tête et connu une débâcle spectaculaire malgré des qualités indéniables. Pourtant, on oublie que le cinéaste a commencé sa carrière avec un petit film modeste mais délectable, Mousehunt, une comédie burlesque mâtinée de fantastique. Pour lui, ce qui compte par-dessus tout, ce sont les idées cinématographiques et le potentiel visuel du récit. Tout cela est amplement illustré dans A Cure For Wellness. Son amour pour le cinéma d’horreur (et son sous-genre sur les savants fous) se manifeste dans cette histoire tordue, concoctée par son scénariste Justin Haythe et lui-même, qui semble prendre racine autant dans la chanson des Eagles Hotel California (« You can check-out any time you like, but you can never leave » [Vous pouvez quitter quand vous le voulez, mais vous ne pouvez jamais partir]) que dans la nouvelle à la fois satirique et horrifique d’Edgar Allan Poe, The System of Dr. Tarr and Professor Fether (1845), qui raconte la soirée angoissante d’un jeune homme visitant un château délabré transformé en asile où les fous ont pris le contrôle et emprisonné le personnel. Suite
RÉSUMÉ SUCCINCT
Un petit restaurateur de rue de Hong Kong doit se mesurer à un chef spécialisé en gastronomie française au cours d’un concours culinaire d’envergure internationale.
RÉSUMÉ SUCCINCT
Deux professeurs de lycée aux tempéraments opposés s’affrontent le dernier jour de l’année scolaire, suscitant la curiosité des élèves.
RÉSUMÉ SUCCINCT
Proche de la soixantaine, Ove, veuf et retraité plutôt casse-pieds, a du mal à s’adapter aux nouveaux voisins, des Iraniens qui tentent de lui rendre la vie agréable.
Représentant la Suède aux Oscars dans la catégorie « Meilleur film étranger », Mr. Ove (pour les anglophones, A Man Called Ove), s’abreuve des codes du mélodrame dans cette adaptation douce-amère du roman de Fredrik Backman, milieu de la trentaine et fin observateur d’époques. Entre les mains du Suédois Hannes Holm, 17 productions, cinéma et télévision confondus, et que nous découvrons ici, la mise en scène à la fois rythmée et discrète compte surtout pour ses dialogues magnifiquement écrits.
Des retours en arrière nous dévoilent le parcours de cet homme du peuple, simple, laborieux, prenant la vie comme elle vient, épousant les codes d’une société suédoise des années 1950, encore conservatrice, mais fidèle aux valeurs de la famille et de la tradition. Mais c’est surtout sur le plan de l’interprétation qu’on se laisse séduire par ce film réalisé selon les règles de la mise en scène d’une autre époque même si la grande partie du film se passe aujourd’hui. Rolf Lassgård campe avec adresse le rôle d’un homme proche de la soixantaine, le Ove du titre, mais qui paraît 20 ans de plus à cause d’un maquillage mal ajusté. Mais on oublie vite ce détail grâce à des répliques qui, dans un monde actuel obsédé par son attitude politiquement correcte, ne passent plus.
Sur ce point, la séquence dans une gare de train en dit long sur l’état de l’Occident aujourd’hui, insensible, égoïste, je-m’en-foutiste, et qui survit grâce aux volontaires qui n’ont pas perdu le sens de l’humanité. Et c’est Parvaneh, une nouvelle voisine d’origine iranienne (excellente Bahar Pars) qui apprendra à Ove à renouer avec la vie, grâce aussi à son mari et surtout à ses deux petites, en attendant une troisième naissance. Elle aussi, issue d’un autre continent où les gens sont moins sensibles parce qu’habitués au conflits, saura comment amadouer le retraité (en fait, il a été licencié) et lui apprendre à (re)vivre.
Dans ce lieu particulier, sorte de microcosme qui paraît coupé du monde et que partagent quelques familles, on remarquera un jeune couple d’homosexuels qui, par leur candeur, sauront attendrir le cœur d’Ove, issu d’une génération fermée sur la question. Avec Mr. Ove, l’ancien et le nouveau s’accordent pour mieux préparer le futur. C’est déjà quelque chose de gagné.
Genre : COMÉDIE DRAMATIQUE – Origine : Suède – Année : 2015 – Durée : 1 h 56 – Réal. : Hannes Holm – Int. : Rolf Lassgård, Bahar Pars, Filip Berg, Ida Engvoll, Tobias Amlborg, Klas Wiljergård – Dist./Contact : TVA.
Horaires : @ Cinéma Beaubien – Cinéma du Parc – Cineplex
CLASSEMENT
Tout public
(Déconseillé aux jeunes enfants)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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