12 octobre 2017
Alors que la super-héroïne déesse et justicière ayant fait son apparition dans DC Comics Books en 1941 semblait, depuis les dernières décennies, avoir disparue de la culture populaire, voilà que Wonder Woman réapparait sous diverses formes, depuis quelques années. Les jeunes filles enfilent le costume à l’Halloween, le film d’animation Wonder Woman (Lauren Montgomery) voit le jour en 2009, deux ans plus tard NBC produit un pilot (Wonder Woman, Jeffrey Reiner) pour une série télé (avortée), puis en 2017, Gal Gadot incarne le personnage dans Wonder Woman, l’anticipé film éponyme de Patty Jenkins. Au contraire des films d’action énoncés ci-haut mettant en scène l’univers frictionnel de l’Amazone, Professor Marston and the Wonder Women, film biographique d’Angela Robinson, relate l’histoire vraie de son créateur, William Moulton Marston, qui sera d’abord professeur de psychologie et inventeur du détecteur de mensonges. Il enseignera notamment à ses élèves « les émotions » au cœur des relations humaines, de par sa théorie DISC (Dominance, Inducement, Submission, Compliance), qui sera plus tard mise en scène dans la bande dessinée, au même titre que sa relation polygame. William Marston, au même titre que sa femme et sa maitresse, vivront en ménage à trois et fondront une famille nombreuse; une conception du couple et de la famille très avant-gardiste pour les années 30-40 (et même encore aujourd’hui). Le film relate leur histoire, comme celle des « Wonder Women » (notez le pluriel du mot femme dans le titre du film), par le biais de retours en arrières, alors que Marston, subit un interrogatoire par la brigade de la moralité de l’époque au sujet de sa bande dessinée.
Ouvertement lesbienne, Angela Robinson s’est intéressée précédemment à la thématique des femmes de la diversité sexuelle de par son long-métrage primé D.E.B.S, un film d’agents secrets, où les relations lesbiennes et bisexuelles des protagonistes adolescentes se retrouvent au cœur d’un récit contemporain non dénudé d’humour. Ayant aussi réalisé des téléséries telles que Girltrash et quelques épisodes de The L Word, Robinson n’est pas en terrain inconnu avec Professor Marston and The Wonder Women.
La réalisation sensible de Robinson, comme son regard non centré sur le voyeurisme, empêche le récit de sombrer dans la porno soft, pour se concentrer sur les répercussions liées à la polygamie, la sexualité fluide, le lesbianisme, la bisexualité et à l’exploration sexuelle, tout en abordant, en fin de récit, les pratiques sadomasochistes. Bien que ces notions soient aujourd’hui abondamment explorées socialement, il convient de se replonger à l’époque de la genèse de cette bande dessinée pour comprendre le côté tabou et avant-gardiste des thématiques explorées. Le film met de l’avant un discours féministe (et inspiré de Marston) explorant le « women empowerment », l’autonomisation, la notion de consentement (dans les relations sexuelles), le respect de la femme, son droit à l’éducation, et bien d’autres facteurs sociaux.
La direction d’acteurs maîtrisée rend les personnages de ce biopic plus que vraisemblables. Dans le rôle d’Elizabeth Marston, Rebecca Hall offre une sublime performance ; une femme forte psychologiquement, intelligente et éduquée, qui n’hésitera pas à exprimer sa vulnérabilité, en fin de récit. Bella Heathcote, qui incarne l’étudiante-stagiaire Olive Byrne, possède la beauté et le charisme nécessaires au fantasme, assises de la relation polygame. Robinson priorise le jeu d’acteurs pour insuffler l’émotion au spectateur, au contraire d’artifices cinématographiques trop appuyés, comme la musique mélodramatique, procédé usé et récurrent de nombreux biopics.
Genre : Drame biographique – Origine : États-Unis – Année : 2017 – Durée : 1 h 48 – Réal. : Angela Robinson – Int. : Luke Evans, Rebecca Hall, Bella Heathcote, Connie Britton, Oliver Platt, J.J. Feild – Dist. : Columbia.
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Si Rebel in the Rye est le premier long métrage de fiction pour le cinéma de Danny Strong, plus connu en tant qu’acteur dans plusieurs téléséries et aperçu, entre autres, dans Knight of Cups (2015) de Terrence Malick, il n’en reste pas moins que son expérience au petit écran l’a sans doute influencé dans la mise en scène, lourde le plus souvent, illustrant la de cet énigmatique auteur américain comme s’il s’agissait d’un drame romantique.
Quelles sont les étapes qui ont bouleversé la carrière de l’auteur de The Catcher in the Rye (en français, L’attrape-cœurs), son unique vrai grand succès traduit en plus de trente langues. Récit biographique en même temps qu’œuvre fictionnel où le côté américain de l’auteur, son judaïsme à peine évoqué, une vision de la vie à la fois étrange et arbitraire, ainsi qu’un rappport assez particulier à la sexualité sont les éléments qui nourrissent ce livre aussi complexe qu’édifiant et que tous ceux qui ont suivi des cours de littérature anglaise ont lu.
C’est le cas de Danny Strong. Son adaptation, cependant, ne montre pas l’enthousiasme, la passion, l’esprit libre et la quête existentielle d’un héros littéraire qui a décidé de se retirer de la vie publique avant que celle-ci le dévore. Pour le spectateur, une déception devant ce film nonchalant, sans risque, malgré l’intervention solide des comédiens.
Genre : Drame biographique – Origine : États-Unis – Année : 2016 – Durée : 1 h 49 – Réal. : Danny Strong – Int. : Nicolas Hoult, Zoey Deutch, Kevin Spacey, Sarah Paulson, Lucy Boynton, Victor Garber – Dist. : Métropole Films.
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Le film de Martin Campbell évoque pour certains spectateurs la trilogie des films de « vengeance » avec Charles Bronson – Death Wish / Un justicier dans la ville (1974), Death Wish 2 / Un justicier dans la ville 2, Death Wish 3 / Un justicier à New York (1985), tous les trois de Michael Winner, ainsi que Death Wish 4: The Crackdown / Le justicier braque les dealers (1987) de J.L. Thompson et Death Wish V: The Face of Death / Le justicier : L’ultime combat (1994) de Allan A. Goldstein – sauf que Martin Campbell est un cinéaste doué qui enrichit ici la mise en scène de trouvailles audacieuses, merveilleusement ciblées dans la présentation d’un personnage anéanti par la mort de sa fille, victime d’un acte terroriste mystérieux.
Les ficelles du genre sont utilisées avec discernement et force est de souligner que la fiction en question puise ses sources, non seulement à partir du roman de Stephen Leather, mais avant tout, fort probablement, d’une société actuelle où les actes revendicateurs sont monnaie courante et arrivent régulièrement.
Jackie Chan excelle dans un rôle dramatique, fort et puissant, tant par sa dynamique physique que par sa gestuelle ; quand vient le temps d’un combat, il s’emploie à rappeler aux spectateurs qu’il possède (preuves précédentes à l’appui) de nombreux autres talents.
Avec Pierce Brosnan, cette fois-ci dans le rôle d’un bad guy, Chan compose un étrange duo face à un monde impitoyable où la vie humaine n’est rien quand il s’agit de défendre des idéologies opposées sur la valeur de l’existence.
Genre : Suspense – Origine : Grande-Bretagne / Chine – Année : 2017 – Durée : 1 h 54 – Réal. : Martin Campbell – Int. : Jackie Chan, Pierce Brosnan, Charlie Murphy, Katie Leung, Rory Fleck Byrne, Simon Kunz – Dist. : V V S.
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Genre : Suspense policier – Origine : Grande-Bretagne – Année : 2016 – Durée : 1 h 49 – Réal. : Juan Carlos Medina – Int. : Bill Nighy, Olivia Cooke, Douglas Boothe, Eddie Marsan, Daniel Mays, Sam Reid, Maria Valverde – Dist. : TVA Films.
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6 octobre 2017
La découverte de soi, l’éveil sexuel, le passage à l’âge adulte : des sujets qui semblent intéresser les jeunes cinéastes françaises. Et elles abordent ces thématiques avec plus d’audace et de transgression que jamais depuis quelques temps. Julie Ducournau est allé dans l’extrême avec le cannibalisme dans son magnifique Grave l’an dernier. Cette année, c’est au tour de Léa Mysius, 28 ans, de s’attaquer à ces sujets qui peuvent facilement tomber dans le cliché. Avec la cécité d’une jeune adolescente comme trame de fond, elle fait toutefois preuve d’une jolie maîtrise dans son très beau Ava, son premier film à titre de réalisatrice.
Ava est une jeune fille de treize ans qui passe ses vacances avec sa mère dans une ville balnéaire du sud de la France. Lors d’une visite chez son optométriste, elle apprend que sa vision s’affaiblit dangereusement et qu’elle la perdra définitivement plus tôt que prévu. Sa mère, contrôlant mal ses émotions, s’entête à ce que sa fille passe tout de même le plus bel été de sa vie. Mais Ava, solitaire et révoltée, décide d’affronter le problème autrement, dans l’urgence de vivre et de voir, avant que tout disparaisse.
Dès le plan d’ouverture, on est frappé par les couleurs. Les parasols, les maillots de bain, les jouets qui traînent sur la plage : une orgie de couleurs s’offre à nos yeux. Puis la caméra se concentre sur un chien noir qui se faufile à travers cet arc-en-ciel peuplé de vacanciers. Le chien se rend jusqu’à Ava, endormie sur le bord de l’eau, vêtue de son maillot de bain bleu et rose, pour lui voler quelques frites. À l’image de cette première scène, tout au long de son film, Léa Mysius se concentre sur la noirceur qui vient contaminer les couleurs, la noirceur qui suit toujours Ava, et envahit sa vision et son esprit.
Le film est donc éclatant de lumière solaire dans sa première partie et s’assombrit de plus en plus alors que la fin approche. Des taches d’ombre ou de noir ne cessent d’apparaître dans la caméra de Mysius. La contamination commence avec ce chien sur la plage, puis avec les mains tachées de peinture d’Ava et, surtout, avec ce ténébreux gitan aux shorts et aux cheveux noirs qui deviendra l’objet des désirs et de la passion de notre protagoniste.
Ce procédé d’opposition entre noirceur et couleur est extrêmement bien maîtrisé par la cinéaste. Il permet la composition de magnifiques images mais aussi une exploration riche de la psyché de l’héroïne. Celle-ci est admirablement campée par la jeune Noée Abita, une véritable révélation. À travers un jeu physique impressionnant, elle offre une performance animale. Elle est grouillante de vie, de passion, de fougue.
À l’image de sa protagoniste, Ava est une œuvre brûlante de sensualité. Dans le jeu charnel d’Abita pour commencer, mais également dans ses images, ses sublimes paysages de l’Atlantique et dans sa façon d’aborder ses thématiques, son rapport à la mer, à la chaleur, à la peau. Une aura constante de mystère, de romance et de sensualité plane sur le film.
Le scénario est également enlevant et original. Le réalisme, la crédibilité ou la cohérence sont le plus souvent absents… et c’est tant mieux ainsi. Le film surfe tout de même à la limite du magique, voire du fantastique. La réalisatrice arrive à maintenir cette tension avec une grande habileté. À l’instar de ce que l’on vit au début de l’adolescence, tout ne fait pas toujours de sens dans ce film, et c’est ce qui en fait sa beauté.
Genre : Drame – Origine : France – Année : 2017 – Durée : 1 h 45 – Réal. : Léa Mysius – Int. : Noée Abita, Laure Calamy, Juan Cano, Tamara Cano, Carmen Gimenez, Mila Cheuzzi – Dist. : FunFilm.
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@ Cinéma Beaubien
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