9 juin 2017
De son père Guy Bedos, grand humoriste-comédien-scénariste [et al.], Nicolas Bedos a hérité de la répartie acerbe, de la débauche littéraire, du sans-gêne attendrissant, d’un visage de doux enfant qu’on a envie de chérir, d’une fausse modestie qui finit par se traduire en amour-propre pas souvent contrôlé et en arrogance et audace triomphantes.
C’est ce qui rend le personnage de M. Adelman si charismatique, car vrai, faisant partie des humains, le tchatcheur d’une autre époque. C’est ce qui explique que le film débute dans ce que les années 1970 avaient de plus beau à offrir : disco, liberté sexuelle, choix des partenaires, époque issue des bouleversements soixante-huitards qui, en fin de compte, et avec le passage du temps, n’ont pas vraiment livré la marchandise
L’histoire d’un couple, mais aussi celle d’un pays, la France, territoire hexagonale qui raconte les trois dernières décennies du 20e siècle selon une perspective urbaine de l’intime, du privé, des amours contrariés, et particulièrement difficiles, compliquées, et c’est pour cela qu’elles comptent, car elles font partie de l’expérience « réelle » ; l’existence qui n’annonce pas les bons et les mauvais coups.
Mais Monsieur & Madame Aldelman, c’est aussi un regard sur le cinéma français. Le film évoque les belles années de Claude Lelouch, lorgne du côté Claude Sautet en sachant bien qu’il risque de se casser la gueule. Et sans crier gare, se permet, alors que c’est un premier long métrage abouti, de jouer la carte du grand film grand public intelligent, rassembleur, parce qu’ils nous ressemblent.
Bedos est un naturel, on l’a vue dans des films comme L’art de la fugue ; ses interventions vénimeuses au mag-télé On n’est pas couché ne laissent pas indifférent. Fils d’un acteur pied-noir, il a su intégrer à son jeu et à sa première mise en scène quelque chose de méditerranéen qui ne s’explique pas. Qui qui sent, qui vibre, qui excite.
Et la dernière séquence, bouleversante, d’une rare émotion, filmée avec une tendresse peu ordinaire, un amour du plan, un respect des personnages, rompt soudain avec le reste de cette saga amoureuse qui claironne constamment sa liberté. Et qu’importe les maquillages pas toujours convaincants. Nous sommes au cinéma.
Et puis, bien sûr, Doria Tillier, sa compagne dans la vraie vie. Saisissante, bouleversante, superbe, attribuant à la féminité un nouveau visage, celui de l’intemporalité. Parce que vraie, lucide, sans ambages, face à une caméra qui n’hésite pas une seconde à la carresser avec des effleurements affectueux. Avec Monsieur & Madame Adelman, Nicolas Bedos se place parmi les grands du film populaire haut de gamme. C’est déjà étonnant.
Genre : Comédie dramatique – Origine : France / Belgique – Année : 2017 – Durée : 2 h 01 – Réal. : Nicolas Bedos – Int. : Doria Tillier, Nicolas Bedos, Denis Podalydès, Antoine Gouy, Christiane Millet, Pierre Arditi – Dist. : MK2 | Mile End.
Horaires
@ Cinéma Beaubien – Cineplex
Classement
Tout public
(Déconseillé aux jeunes enfants)
MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. ★ Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.
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