En salle

Un beau soleil intérieur (pour)

14 juin 2018

| PRIMEUR |
Semaine 24
du 15 au 21 juin 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
Divorcée, un enfant, Isabelle ne peut se complaire à vivre sans amour. Chaque homme qu’elle rencontre la déçoit, même son ex avec qui elle a une aventure qui se solde lamentablement.

LE FILM DE LA SEMAINE
pour
| Élie Castiel |

★★★★

Fragments du discours amoureux

Et non pas « d’un » discours amoureux comme l’a rapporté Roland Barthes dans son essai culte publié en 1977. Car ici, cet objet cinématographique sur l’affect/amour de Claire Denis a quelque chose de philosophique en soi. La recherche amoureuse d’Isabelle, une Juliette Binoche devenue presque muse antique, circule aux extérieurs et intérieurs d’un Paris transformé en temple païen, comme si elle détenait les pouvoirs de la séduction alors que les hommes, de simples mortels, ne semblent pas prêts à assumer des compromis. Quelque chose de fragile, d’humainement fragile entre Isabelle et ses ()conquêtes, entre sa recherche non pas uniquement de sexe, mais de rapport (hétérosexuel) à l’autre, c’est vraiment ce qui l’intéresse. Au point d’oublier (un peu, pour certains beaucoup) sa fille puisqu’elle vit un moment qui la dépasse.

En ces temps de #MoiAussi ou #MeeToo si vous préférez, le film de Claire Denis peut transmettre au regard une aura d’indignation si le récit concret est vu au premier degré alors que les apparences sont trompeuses, comme la scène ou Isabelle rejoint son ex dans un rapport amoureux qui la déconcerte.

Isabelle de nuit, Isabelle de jour, toujours insaisissables, ou
encore Juliette Binoche lancée dans une aventure qui revigore
bien plus sa carrière d’actrice immaculée,  indubitablement
portée par un je-ne-sais-quoi qui la rend invulnérable.

Non, le sexe n’est pas le but principal à atteindre pour cette femme du XXIe siècle face à certains hommes (toujours hétérosexuels) qui n’ont pas bougé d’un iota. Comme le banquier trop heureux de poursuivre une relation adultère, le comédien qui traverse une crise existentielle et qui ne sait sur quel pied danser ou encore le client chez l’épicière qui représente l’homme dragueur aux bonnes manières, mais passéiste.

On ne badine pas avec l’amour, certes, mais force est de souligner que les sentiments nous jouent souvent des tours. On pense souvent à Beau travail (1999), toujours de Claire Denis, où l’homoérotisme palpable n’était en sorte que la représenation de la violence et du désir au masculin, sommant le spectateur de réajuster son regard. Même variation ici, mais du point de vue de la femme hétéro et mis en valeur par la première séquence de « baise » qui annonce une suite à laquelle on ne s’attend pas. Car chez Denis, le suggestif est plutôt de l’ordre de la philosophie; les mots crus ne le sont que pour établir une époque; la distanciation entre la protagoniste principale et ceux et celles qui l’entourent (particulièrement les hommes) existent comme des fragments d’un discours sur l’affect, un lieu de tous les (im)possibles et fréquemment invariables et éphémères.

Isabelle de nuit, Isabelle de jour, toujours insaisissables, ou encore Juliette Binoche lancée dans une aventure qui revigore bien plus sa carrière d’actrice immaculée, indubitablement portée par un je-ne-sais-quoi qui la rend invulnérable.

[ Voir critique « contre »  ici, par Vincent Zeis ]

« Prix SACD »
(Société des auteurs et compositeurs dramatiques)
Quinzaine des réalisateurs
Festival de Cannes 2017

Sortie
vendredi 15 juin 2018

V.o.
français ; s.-t.a.

Let the Sunshine In

Réalisation
Claire Denis

Genre
Drame

Origine
France / Belgique

Année
2017

Durée
1 h 35

Distributeur
Métropole Films

Horaires & info.
@ Cinéma BeaubienCinéma du ParcCineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans
(Accès autorisé si accompagnés d’une adulte)

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais.
½ [Entre-deux-cotes]

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