En salle

The Florida Project

19 octobre 2017

RÉSUMÉ SUCCINCT
Moonee n’a que six ans et vit dans une chambre de motel avec sa mère. Profitant du manque de surveillance, elle décide de faire les quatre cents coups avec une bande de gamins de son âge.

CRITIQUE
Texte : Jules Couturier

★★★ ½

LA MAGIE DANS LA MISÈRE

L’envers du décor. L’Amérique marginalisée. Voilà ce qui intéresse le cinéaste new-yorkais Sean Baker. Après nous avoir montré l’autre côté d’Hollywood en 2015 avec son acclamé Tangerine, dans lequel on voyait parader deux prostituées transgenres afro-américaines à la recherche du copain infidèle de l’une d’entre elles, voilà qu’il nous revient avec The Florida Project. Cette fois, il s’intéresse à la périphérie de Disney World, cet immense paradis de consommation américain.

Moonee, six ans, et sa jeune mère Halley demeurent au Magic Castle, un motel miteux, peint en mauve, à quelques pas du grand Disney World d’Orlando. Là se côtoient tous les laissés-pour-compte du rêve américain, ceux, comme le montre certaines scènes du film, dont la totalité des effets personnels tient dans une voiture, ceux qui considèrent que travailler dans un restaurant fast-food est un luxe, ceux qui doivent tout donner, et encore plus, pour joindre les deux bouts. C’est à travers ce microcosme de l’Amérique déchue que courent Moonee et ses copains, tous plus insouciants les uns que les autres, toujours prêts à faire une nouvelle bêtise ou à aller manger un autre cornet de glace.

The Florida Project

The Florida Project se situe à mi-chemin entre la fresque sociale et la poésie magique. On y présente une situation triste et réelle mais observée en majeure partie du point de vue d’un enfant. Les grands angles et les grands plans qu’utilise Baker, souvent cadrés avec la tête des enfants devant, soulignent à quel point le monde leur paraît immense. Les couleurs vives et saturées révèlent un monde qui leur paraît féerique. Le film n’est donc jamais trop pénible. On ne tombe pas dans l’apitoiement. L’enfant ne perçoit pas la misère. Au contraire, il en fait un jeu. Il est amusant pour Moonee d’aller quémander des sous ou d’essayer de vendre illégalement des parfums aux riches. Baker célèbre l’innocence et la magie de l’enfance.

Sans jamais tomber dans le misérabilisme,
gardant toujours la tête haute,
The Florida Project demeure un film tragique.

À l’opposé de Moonee, le spectateur, lui, la perçoit cette déchéance. L’esthétique de couleurs saturées lui rappelle la magie de l’enfance, certes, mais également la surconsommation tape-à-l’œil, grossière et bas de gamme de l’Amérique. Alors que Moonee s’amuse, le spectateur les voit, lui, les prostituées et les pédophiles qui la côtoient. Il la voit la misère. Il les voit les sacrifices que les parents doivent faire et les amitiés qui se brisent. Surtout, en voyant la mère, elle-même à peine sortie de l’enfance, tenter de se démerder tant bien que mal dans cette situation précaire, le spectateur anticipe les difficultés auxquelles l’optimisme et l’énergie débordante de Moonee se heurteront tôt ou tard. Sans jamais tomber dans le misérabilisme, gardant toujours la tête haute, The Florida Project demeure un film tragique.

| PRIMEURS |
Semaine du 20 au 26 octobre 2017

Sortie :  vendredi 20 octobre 2017
V.o. :  anglais ; s.-t.f.
Mon royaume en Floride

Genre :  Comédie dramatique – Origine : États-Unis –  Année :  2017 – Durée :  1 h 52  – Réal. : Sean Baker – Int. : Willem Dafoe, Brooklynn Prince, Valeria Cotto, Bria Vinaite, Christopher Rivera, Caleb Landry Jones –  Dist. :  Entract Films.

Horaires
Cinéma du ParcCineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans
(Langage vulgaire)

MISE AUX POINTS
★★★★★  Exceptionnel★★★★  Très Bon★★★  Bon★★  Moyen★  Mauvais½  [Entre-deux-cotes]  –  LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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