En salle

A Quiet Place

5 avril 2018

| PRIMEUR |
Semaine du 6 au 12 avril 2018

RÉSUMÉ SUCCINCT
Une famille vit calmement dans une ferme retirée du Midwest. Soudain, des présences occultes se mettent à harceler chacun des membres.

CRITIQUE
| Élie Castiel |

★★★★

DE BRUITS ET DE FRAYEUR

C’est épidermiquement palpable, tout à fait concevable que John Krasinski, comédien dans plus d’une quarantaine de productions, tous genres confondus, entre par la grande porte avec A Quiet Place (Un coin tranquille), après deux bouts d’essai dans le long métrage marginalement aboutis, Brief Interviews with Hideous Men (2009) et The Hollars (2015). Film d’épouvante qui n’hésite pas à faire un clin d’œil au Alien (1978) de Ridley Scott, se juxtaposant à lui comme s’il fallait que l’hommage demeure aussi intègre que revendicateur, assumant fermement son identité.

En effet, c’est un film fait de bruits et de frayeur, le son devenant un personnage à part entière, comme dans tous ces très longs faux silences qui hantent le film depuis le tout début et se propagent à travers ce récit autant sur la survie que sur la peur de l’autre, de l’inconnu. Survivre non seulement individuellement, mais revendiquer la notion de famille comme base de l’univers sur Terre (d’où la naissance d’un enfant dans un lieu pourtant hostile).

Les deux autres enfants, Regan, l’adolescente, et Marcus, plus jeune et effrayé, deviennent des héros du moment malgré la mort d’un autre fils, dans des circonstances affreuses. Film tout à fait de genre, A Quiet Place a ceci de particulier qu’il exige du spectateur une concentration totale, rejetant par là-même son vocabulaire de base auquel il est habitué de voir et d’entendre dans les films de genre. Ce défi intellectuel, Krasinski l’annonce avec une extase qui se manifeste par sa présence à l’écran, puissante, d’une virilité non menaçante, car nourrie de cet attribut souvent mal accueilli à l’écran par les hommes de sa stature, une tendresse bercée par un sens aigu de l’humanité.

Krasinski a merveilleusement atteint son but en
faisant de son troisième film de long métrage un
film à la fois métaphysique et politiquement engagé.

Il ne peut s’empêcher d’être ainsi puisque sa compagne dans la vraie vie est devant lui, incarnée par une Emily Blunt comme jamais vue auparavant, d’une sensualité dans sa grossesse qui convoque le respect et laisse voir des traces de féminité conquérante et pourtant pudique. Dans un dernier plan qu’on ne vous révélera pas, elle annonce que le #MoiAussi est une question d’égalité, de partage et de conscientisation sociale.

Film cérébral, presque film d’auteur, du moins dans le genre abordé, A Quiet Place annonce avec vigueur un nouveau parcours dans le genre. Krasinski a merveilleusement atteint son but en faisant de son troisième film de long métrage un film à la fois métaphysique et politiquement engagé. L’aliénation n’est plus seulement dans les grandes villes, mais elle s’est propagée dans tous les coins de l’Amérique, même les plus éloignés. La menace venue d’ailleurs n’est après tout, semble dire Krasinski, que celle qu’on imagine en raison de nos temps vides et incertains. Avec ce film d’une beauté plastique totalement aboutie, il confirme qu’un grand cinéaste qui compte est né. En attendant, il n’est pas superflu de dire qu’aucun retour en arrière ne lui est possible. Trippant!\

Sortie : vendredi 6 avril
V.o. : anglais / Version française
Un coin tranquille

Réalisation
John Krasinski

Genre : Suspense d’épouvante – Origine : États-Unis – Année : 2018 – Durée : 1 h 30 – Dist. : Paramount Pictures.

Horaires & info.
@ Cineplex

Classement
Interdit aux moins de 13 ans
(Sauf si accompagné d’un adulte | Horreur)

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]

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