En salle

Diplomatie

19 novembre 2014

EN QUELQUES MOTS
Texte : Anne-Christine Loranger
Cote : ★★★★

Réalisateur allemand ayant longtemps travaillé en France, Volker Schlöndorff (La Mer à l’aube, Le Tambour) était mieux placé que quiconque pour diriger ce suspense d’une nuit interprété par André Dussolier dans le rôle de Nordling et Niels Arestrup dans celui de von Choltizt. Le réalisateur se démarque du huis-clos de la pièce en débutant son film par des extraits d’archives en noir et blanc montrant l’Europe bombardée, puis par de superbes images de Paris, qui recentrent le débat sur la question du patrimoine humain en jeu. Le sujet semble à la mode puisqu’il a été aussi abordé – sinon malmené, au sein du film de George Clooney, The Monuments Men (2013).

On ne peut s’empêcher, en voyant le duel verbal qui s’engage entre von Choltizt et Nordling, de penser au film Le Souper d’Édouard Molinaro (1992). Ici comme là, deux œuvres cinématographiques adaptées de pièces longuement jouées et tournées par le même duo d’acteurs (Claude Rich et Claude Brasseur, de même que Dussolier et Arestrup, avaient précédemment joué la pièce de Jean-Claude Brisville avant de tourner l’adaptation de Molinaro). Ici comme là, une rixte verbale où deux adversaires décident du sort de la France. Le personnage de Dussolier, comme celui de Claude Rich qui interprétait Talleyrand, tient dans une exquise retenue vis-à-vis de celui de von Choltizt qui, comme le Joseph Fouché de Claude Brasseur, se montre d’une intransigeance brutale, inflexible, insensible. Mais si l’ivresse du film de Molinaro résidait dans le feu d’artifice verbal entre les personnages, sous-tendu par un médianoche d’une gourmandise quasi perverse, l’intérêt du film de Schlöndorff tient dans les moyens de persuasion dont usera Nordling face à l’inflexible Prussien.

Éthique, humanisme, protection des Alliés et jusqu’à l’utilisation à bon escient d’une crise d’asthme de Choltizt, tout y passe. La direction photo de Michel Amathieu, qui évolue du plan moyen au plan rapproché pour retourner au plan de demi-ensemble, capte finement les jeux subtils de Dussolier et Arestrup, lesquels offrent des palettes riches en nuances et de superbes performances. Amathieu use habilement du clair-obscur et des ombres sur les visages pour faire comprendre la complexité des émotions en jeu.

Les Allemands, on le sait, sont de grands amateurs d’art et de beauté. La conclusion du film de Schlöndorff, qui se laisse deviner entre les lignes, pourrait être qu’au matin du 25 août 1944, l’intransigeant Prussien, victime de sa propre culture, n’a pu se résoudre à massacrer la radieuse princesse qui s’étirait dans la lumière de l’aube. La France et l’Europe peuvent lui en savoir gré. Il faut dire que la séduction de Paris opère depuis des siècles. Même un monstre Nazi n’a pu lui résister.

Sortie : Vendredi 21 novembre 2014
V.o. : anglais
S.-t.a. – Diplomacy

Genre : Drame historique | Origine : France / Allemagne – Année : 2014 – Durée : 1 h 24 – Réal. : Volker Schlöndorff – Int. : Niels Arestrup, André Dussolier, Burghart Klaussner, Robert Stadlober, Stefan Wilkening, Jean-Marc Roulot – Dist. / Contact : Métropole | Horaires / Versions  : Beaubien Cineplex – Excentris

CLASSIFICATION
Visa GÉNÉRAL

MISE AUX POINTS
★★★★★ (Exceptionnel) ★★★★ (Très Bon) ★★★ (Bon) ★★ (Moyen) (Mauvais) 1/2 (Entre-deux-cotes) – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

2024 © SÉQUENCES - La revue de cinéma - Tous droits réservés.