En salle

Jersey Boys

19 juin 2014

En quelques mots

Texte : Élie Castiel
Cote :  ★★★★

Il aura suffi qu’à propos de Jersey Boys, quelques voix critiques évoquent le nom de Martin Scorsese pour qu’une partie de leurs collègues répètent la même chose. Avec Bird et Honkytonk Man, Clint Eastwoord abordait le genre musical avec la subtilité qu’on lui connaît, amalgamant recherche formelle et précision dans la structure narrative.

Adaptation d’un succès de Broadway, Jersey Boys est en fin de compte une belle déclaration d’amour envers un genre, le drame musical, et une époque que le cinéaste semble affectionner. Et ce qui est d’autant plus surprenant dans cette comédie musicale, par ailleurs fort entraînante, c’est de constater qu’à 84 ans bien sonnés, le vétéran cinéaste s’abandonne, se laisse aller intentionnellement dans un genre vilipendé par une certaine critique, et bien plus que cela, se prête au jeu de la facilité avec une infinie tendresse.

Ici, il ne s’agit pas de déconstruire le récit, de chercher des formules esthétiques avant-gardistes, de s’assurer que la mise en scène se réinvente , mais au contraire, le cinéaste joue à fond la corde sensible de la sincérité, ; il le fait avec une fraîcheur étonnante, un respect émouvant pour le grand public.

Tubes d’une autre époque aidant, car force est de souligner qu’on les fredonne parfois aujourd’hui, le réalisateur manipule la notion d’affect à sa guise, prend un plaisir fou à filmer ce qu’il n’a pas l’habitude de faire et s’en fout éperdument du qu’on dira-t-on. Il s’agit d’un film volontairement linéaire, traité de façon conventionnelle… et pourquoi pas ?

Et oui, on parle des liens du groupe avec la mafia italienne locale, des petits coups sans grandes conséquences ; on parle aussi des rapports qui unissent et opposent les quatre chanteurs. Oui, on peut penser à Scorsese, mais une question s’impose : le cinéaste de Mean Streets (Les Rues chaudes) aurait-il le monopole des mafieux italiens made in USA ?

Hormis le fameux Can’t Take My Eyes Off You chanté en entier avec une passion débordante, les autres chansons du groupe ne sont que partiellement esquissées, mais durent assez longtemps pour qu’on les savoure davantage.

De temps en temps, nous devons, nous les critiques, nous laisser aller, nous abandonner en mettant de côté tels ou tels préjugés afin d’apprécier certain films à leur juste valeur. La mélancolie, la nostalgie, et surtout l’émotion montrée directement, de façon brute, sans concessions, ne sont pas nécessairement des ingrédients narratifs malhonnêtes et manipulateurs.

Sur ce point, Jersey Boys est avant tout un film mélancolique, traité avec un soin du détail et une immense et folle envie de faire du cinéma. Quant aux comédiens, incluant John Lloyd Young, ils sont tous irréprochables. Quoi qu’il en soit, la perception que nous avons d’un film et avant tout une question personnelle faisant partie de notre idiosyncrasie.

Sortie : Vendredi 20 juin 2014
V.o. : Anglais
V.f. / S.t.f. – Jersey Boys

[ BIOGRAPHIE MUSICALE ]
Origine :États-Unis – Année : 2014 – Durée : 2 h 14 – Réal. : Clint Eastwood – Int. : John Lloyd Young, Christopher Walken, Freya Tingley, Vincent Piazza, Michael Lomenda, Erich Bergen – Dist. / Contact : Warner | Horaires / Versions / Classement : Cinéma du ParcCineplex

MISE AUX POINTS
★★★★★ (Exceptionnel) ★★★★ (Très Bon) ★★★ (Bon) ★★ (Moyen) (Mauvais) 1/2 (Entre-deux-cotes) – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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