En salle

La Marche

10 avril 2014

En quelques mots
Texte : Sami Gnaba
Cote :

De par son titre, le film de Nabil Ben Yadir induit un mouvement, une action toujours en cours. Ce qui est d’ailleurs vrai, tant ce combat entamé voilà 30 ans contre le racisme et les inégalités sociales reste toujours à gagner. Pourtant, même porté par les plus belles des intentions (rappeler à la société d’aujourd’hui un mouvement antiraciste méconnu par plusieurs), La Marche rate sa cible. Dans une mise en scène impersonnelle et téléfilmesque, Yadir donne l’impression de filmer comme on déroule les pages d’un scénario. Ce qui rend la progression de son récit souvent artificielle. À ne pas savoir trop où donner de la tête (la piste autour des agents des Renseignements Généraux par exemple), le réalisateur perd de vue l’importance de ses personnages, qu’il se plaît malheureusement à regarder avec un simplisme affligeant…

Des caricatures. À part Olivier Gourmet qui se révèle encore une fois incontournable, le reste de la distribution (la belle Hafzia Herzi et le génial Vincent Rottiers si platement filmés) traverse le film en accumulant les clichés les plus élémentaires ; le gros comme faire-valoir comique, le jeune romantique taiseux,  le joueur de guitare au passé trouble ou encore l’indésirable drogué des banlieues (Jamel Debbouze, éprouvant) à qui bien sûr le film offrira sa rédemption au final. À tout cela, on pourra aussi évoquer le malaise suscité autour des deux personnages féminins (la lesbienne et l’arabe) qui de tout le groupe seront les seules à être victimes des coups et de la violence des opposants à leur mouvement. Rebondissements qui ne participent à rien d’autre qu’à maximiser le niveau d’empathie des spectateurs. À l’instar de ce plan d’archive, abruptement introduit dans la chronologie du récit, dans lequel la télévision française fait état de la mort injustifiée d’un jeune enfant des banlieues.

Ce n’est pas le rappel de ces violences et cette intolérance qu’on se refuse d’accepter, loin de là, mais plutôt leur mise en fiction, pas toujours honnête, forcée et poussive. De la même manière, on reste très perplexe devant la conclusion du film, dans laquelle le succès de la marche paraît se mesurer moins par le nombre des citoyens réunis (100 000 personnes) à Paris, qu’à l’annonce triomphale sur la tribune que le président François Mitterrand recevra à l’Élysée le groupe de marcheurs, pour discuter de leurs revendications…Un happy-end qui lorgne clairement vers la grandiloquence du cinéma hollywoodien, dont l’unanimisme frôle l’indécence quand on pense aux fissures sociales qui continuent à marquer la France d’hier et d’aujourd’hui.

Sortie : Vendredi 11 avril 2014
V.o. : Français ; Arabe, S.-t.f.

[ DRAME SOCIAL ]
Origine :
France / Belgique – Année : 2013 – Durée : 2 h 06  – Réal. : Nabil Ben Yadir – Int. : Tewfik Jallab, Olivier Goumet, Jamel Debbouze, Vincent Rottiers, M’Baret Belkouk, Lubna Azabal, Hafsia Herzi – Dist./Contact : A-Z Films | Horaires /Versions /Classement : Cineplex

MISE AUX POINTS
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