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La Vie privée du cinéma

26 mai 2011

Présentées aux derniers Rendez-vous du cinéma québécois,  les deux parties de La Vie privée du cinéma seront projetées au mois de juin 2011.
Maison de la réalisation | 19h00 —  1er juin (première partie) / 8 juin (deuxième partie)
Cinéma ONF | 19h00 — 6 juin (première partie) / 13 juin (deuxième partie)
L’entrée est libre. Les projections seront suivies d’un débat public sur le financement et l’écomomie de l’industrie privée du cinéma.
Nous profitons également de l’occasion pour vous présenter le texte paru dans le plus récent numéro de Séquences (272, p. 7), actuellement en kiosque.

MÉMOIRES VIVANTES

Chaque année, les Rendez-vous du cinéma québécois constituent un lieu de rencontres, de projections, de débats qui permettent de jauger l’état de la production, de connaître les nouvelles œuvres de cinéastes connus et de découvrir des talents prometteurs. Cette année, la présentation des deux volets de La Vie privée du cinéma de Denys Desjardins fut un événement important.

>> Luc Chaput

Dans les années 70 était inscrite au programme de Radio-Canada la très intéressante série documentaire de l’ORTF L’Histoire du cinéma français par ceux qui l’ont fait, produite et animée par Armand Panigel. Elle employait les témoignages des intervenants et protagonistes alors vivants pour faire connaître comment s’est construit ce cinéma national. On remontait même jusqu’au début du muet pour nous faire comprendre les difficultés inhérentes à l’acceptation de ce nouveau moyen de communication au départ considéré comme objet de foire.

Denys Desjardins, depuis les années 90, interviewe par le biais de sa maison de production, Les Films du Centaure, les animateurs des premiers ciné-clubs et les artisans de notre cinématographie. Les deux films sur vidéo, d’une durée totale de 240 minutes, présentés en deux séances deux samedis de suite dans le cadre des Rendez-vous recouvrent et amplifient deux autres de ses productions récentes, De l’Office au Box-office, de 2008, et La Vie privée d’Onyx Films, de 2010.

Il est tout d’abord émouvant de revoir à l’écran, dans des entrevues filmées de manière frontale et dans un décor souvent semblable, des personnages de notre histoire cinématographique, qui d’ailleurs le plus souvent œuvraient derrière la caméra. Que ce soit les réalisateurs Roger Racine, Roger Blais, Jacques Giraldeau et les administrateurs Pierre Juneau et André Lamy, ou d’autres qui ont connu le temps des ciné-clubs avant de bifurquer vers la politique, comme Marc Lalonde, ou certains comme Pierre Patry, qui ont tenté assez rapidement l’aventure du cinéma de fiction par le biais du modèle coopératif, il arrive que deux personnes n’aient pas des souvenirs similaires de certains événements, mais cela fait aussi partie de l’intérêt de cette entreprise.

Claude Fournier nous étonne en disant ne pas savoir qui sont les ayants droit actuels de son immense succès Deux femmes en or, mais cela arrive semble-t-il souvent dans le merveilleux monde du cinéma. Les vaines tentatives de créer comme en France une taxe sur la billetterie (y compris des films américains) pour aider à financer les films canadiens sont aussi évoquées. De même dans la deuxième partie, un intervenant dont je n’ai pu noter le nom déclare que les Scandinaves sont étonnés de l’énormité des budgets de production de certains de nos films alors qu’eux sont restreints à environ un million de dollars, ce qui leur permet de se rapprocher d’une rentabilité. D’ailleurs, André Lamy, en travaillant à Onyx Films — où il produisait des films publicitaires et des films éducatifs pour divers organismes gouvernementaux, et des séries de fiction pour la télé —, avait déclaré à son frère Pierre, tenté par l’aventure de la production de films, que notre bassin de spectateurs était trop petit pour espérer rentabiliser ces films. C’est pourquoi Michael Spencer mit sur pied en 1968 la Société de développement de l’industrie cinématographique canadienne, ancêtre de Téléfilm, qui ne réussit toujours pas à atteindre cet objectif de rentabilisation financière, mais qui permet tout au moins de faire vivre plusieurs de nos artisans et artistes et de susciter des vocations de producteurs qui ne peuvent être que des monteurs de structure financière au lieu d’être de véritables accompagnateurs de cinéastes dans leurs projets.

À la fin de chaque projection, les commentaires et les questions fusaient, et un troisième volet sur le cinéma des femmes et l’ACPAV devrait voir le jour dans la prochaine année. L’importance de l’aller-retour entre cinéma et télévision, et même de ce que certains appellent les téléastes, pourrait être alors aussi scrutée dans cette histoire parlée du cinéma québécois qui prendra place dans nos bibliothèques à côté de la série documentaire télévisuelle Le Cinéma québécois, dont le maître d’œuvre était Georges Privet.

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