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Julieta

26 janvier 2017

RÉSUMÉ SUCCINCT
Sur le point de quitter Madrid pour de bon avec son amoureux, Julieta croise par hasard une amie d’enfance d’Antía, sa fille, qui lui apprend que cette dernière vit maintenant en Suisse avec ses trois enfants. Cette rencontre fortuite remue de douloureux souvenirs chez Julieta, sans nouvelles de sa fille depuis une douzaine d’années.

LE FILM DE LA SEMAINE
CRITIQUE
★★★★ ½
Texte : Élie Castiel

NAUFRAGES RÉDEMPTEURS

Pouvons-nous affirmer que Pedro Almodóvar se laisse désenchanter par le passage du temps, alors qu’enfant de la célèbre movida de l’Espagne post-franquiste, il nous a séduit autant par ses fantasmes outranciers (Pepi, Luci, Bom et les autres filles du quartier / Pepi, Luci, Bom y otras chicas del montón que par le truculent La loi du désir / La ley del deseo), pour ensuite nous faire plaisir avec ses comédies de la maturité comme Femmes au bord de la crise de nerfs  Mujeres al borde de un ataque de nervios et autres), des réalisations qui l’ont certainement conduit à parler des femmes avec sérieux? Ton qu’il adopte affectueusement à partir de Tout sur ma mère / Todo sobre mi madre et parfaitement avec Parle avec elle / Hable con ella.

« Meilleur réalisateur – Pedro Almodóvar »
International Cinephile Society Awards / ICS Cannes Award 2016

Julieta_En salle

Et puis, une pause inutile avec Les amants passagersLos amantes pasajeros) pour revenir ensuite à ses portraits féminins, influences de Bergman et de Hitchcock, cinéastes qui l’ont bercé dans son adolescence. À partir de trois nouvelles, Chance, Soon et Silence, tirées du recueil Runaway (2004, McClleand and Steward et Knopf) de la canadienne Alice Munro, Pedro Almodóvar a construit une œuvre rigoureuse sur l’abandon, le rejet, les regrets et la rédemption. Le film repose aussi sur la notion de l’absence et sur ses complications. Dès la première séquence, un couple, surtout la femme, Julieta, s’adonne sans vraiment envie aux derniers préparatifs pour un voyage au Portugal avec son nouvel amant. Et puis, sans crier gare, elle lui annonce qu’elle ne partira pas avec lui.

La suite, un récit où le present et le passé se joignent dans une mise en scène aussi abstraite que sophistiquée. Par un tour de magie, Almodóvar oublie ou fait semblant  d’oublier les écrits sur lesquels le film se base pour faire son propre cinema. Non, Pedro Almodóvar est toujours aussi vivant, aussi lucide, aussi motivé, si proche de ses personnages et notamment d’un style particulier qu’il affectionnne, essentiellement en laissant les plans, les gros plans et les transitions se compléter en tant qu’effets de styles.

Car c’est aussi de cela qu’est fait le cinéma articulé d’Almodóvar,
un cinéma farouchement européen des vingt dernières années
d’un 20e siècle conscient d’une certaine culture du vieux continent…

Ils comptent bien entendu sur des comédiennes excellentes, vibrantes à chaque moment. Mais c’est dans leurs rapports de force ou de soumission qu’elles s’agitent, face à l’objectif de la caméra de Jean-Claude Larrieu (au générique, Jean-Claude Carrieu), dont on se souviendra de son bon travail dans Les femmes du 6e étage (2010) de Philippe Le Guay. Ici, son œil est indiscret, tenace, portant les protagonistes autant dans leurs démarches que dans leurs zones indécises, filme, selon les époques  avec une emphase aux détails : couleur des murs, objets, tableaux, dont celui accroché au mur de l’appartement de Julieta, au présent, renvoit au déchirement intérieur du sujet et d’elle-même.  

Et un autre acteur concret, le train, comme ceux du célèbre Alfred britannique, un train-lieu qui annonce des autres fictions, des autres réalités, des ailleurs inconcevables, sans doute des intrusions dans l’inconscient. Car c’est aussi de cela qu’est fait le cinéma articulé d’Almodóvar, un cinéma farouchement européen des vingt dernières années d’un 20e siècle conscient  d’une certaine  culture du vieux continent qui n’a jamais oublié ses reférences et ses correspondances aux analyses freudiennes.

Julieta_En salle 2

Amant du mélodrame, le cinéaste ibérique ne renonce pas à aborder le thème de la culpabilité si cher au genre. Se sentir coupable de n’avoir pas parler à temps, de n’avoir pas parler du tout, d’avoir tout cacher, et finalement alors que l’âge nous surprend, il ne reste qu’à offrir au temps qu’il nous reste que de vivre ces moments de rachat. Et les hommes dans toutes ces histoires de femmes; essentiellement des présences concrètes, ne cachant rien, traversant le temps qui avance avec autant de douleur que d’exultation, réalistes, loin de toute considération d’ordre psychanalytique; bref, moins cinématographiques, mais utilement essentiels à la fiction. Julieta, un hommage vibrant au cinéma et à l’éternel féminin.

Sortie :  vendredi 27 janvier 2017
V.o. :  espagnol  / version française, s.-t.a. &  s.-.t.f.
Julieta

Genre :  DRAME – Origine : Espagne – Année :  2015 – Durée :  1 h 40 – Réal. : Pedro Almodóvar – Int. : Adriana Ugarte, Emma Suarez, Daniel Grao, Dario Grandinetti, Inma Cuesta, Rossy de Palma – Dist./Contact :  Métropole.
Horaires :  @  Cinéma BeaubienCinéma du ParcCineplex

CLASSEMENT
Tout public

MISE AUX POINTS
★★★★★  Exceptionnel★★★★  Très Bon★★★  Bon★★  Moyen★  Mauvais½  [Entre-deux-cotes]  –  LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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Kaabil

RÉSUMÉ SUCCINCT
Un homme qui a perdu la vue essaie malgré tout de se venger des meurtriers de sa copine.

EN QUELQUES MOTS
★★★
Texte : Élie Castiel

Des 12 longs métrages de Sanjay Gupta, Kaabil est le plus réussi, en partie, parce qu’il bénéficie de la présence de Hritik Roshan, l’un des plus beaux visages masculins de l’industrie bollywoodienne, et de la resplendissante et vivace Yami Gautam, remarquée dans le délicieux Vicky Donor (2012) de Shoojit Sircar, du costaud Madras Café (2013). Aveugles tous les deux, ils se courtisent, s’aiment et se marient pour, ensuite, être mêlés à une affaire aux rebondissements tragiques.

Le conflit entre le pardon et la notion du fameux œil pour œil,
dent pour dent
prend des proportions démesurées avec
une finale inattendue. Résultat d’une mise en scène rusée
s’adaptant admirablement aux situations. Du bon boulot.

Faisant suite aux nombreux films indiens sur le thème de la vengeance, Kaabil suit les codes de l’industrie et se permet une mise en scène élégante, une direction photo exemplaire signée Ayananka Bose et Sudeep Chatterjee, définissant l’espace et les lieux avec une précision remarquable. Tout en soulignant qu’ils filment les deux principales vedettes avec autant d’enthousiasme que conscients de susciter l’adhésion d’un public conquis d’avance.

Kaabil

Comme d’habitude, dans ce genre de films, le réalisateur n’évite pas le message moral final, dont le grand public indien raffole. En général, les cinéastes bollywoodiens semblent, de par leurs films, se présenter comme des psychologues du peuple, alimentant leurs récits de critiques sociales, politiques et familiales.

Le conflit entre le pardon et la notion du fameux œil pour œil, dent pour dent prend des proportions démesurées avec une finale inattendue. Résultat d’une mise en scène rusée s’adaptant admirablement aux situations. Du bon boulot.

Sortie :  vendredi 27 janvier 2017
V.o. :  hindi  / s.-t.a.
Capable / The Mind Sees All

Genre :  DRAME – Origine :  Inde –  Année :  2017 – Durée :  2 h 20  – Réal. :  Sanjay Gupta – Int. : Hrithik Roshan, Yami Gautam, Ronit Roy, Rohit Roy, Narendra Jha, Suresh Menon – Dist./Contact : Imtiaz Mastan.
Horaires : @  Cineplex

CLASSEMENT
Interdit aux moins de 13 ans

MISE AUX POINTS
★★★★★  Exceptionnel★★★★  Très Bon★★★  Bon★★  Moyen★  Mauvais½  [Entre-deux-cotes]  –  LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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La tortue rouge

RÉSUMÉ SUCCINCT
Au cours d’une violente tempête, un homme dont la barque a chaviré est projeté par les vagues sur un îlot désert. Lentement, il apprivoise les lieux. Un jour, il constate une tortue rouge. Cette découverte sera la début d’un merveilleux récit sur le destin de l’Homme.

EXTRAIT CRITIQUE
★★★★★
Texte : Élie Castiel

Comme par magie, le pinceau du cinéaste transforme son récit créateur en une odyssée grecque; l’aède Homère est convoqué pour illustrer le voyage initiatique de cet homme perdu dans une nature hostile et bienveillante à la fois. L’histoire d’une vie, d’une existence humaine et humaniste se déroule devant nos yeux dans ce film en plusieurs parties : la découverte du monde par l’homme (pour se distinguer des autres créatures déjà présentes), l’apparition somptueuse de la femme (pour que l’homme puisse se compléter) et la naissance (pour marquer ainsi le fondement d’une famille). Et plus tard, le départ de fils pour d’autres cieux, la solitude des parents et la mort du géniteur.

Ce portrait idyllique et dans le même temps dramatique
de la genèse se transforme en un conte philosophique…

La tortue rouge est un film sur la circularité de la vie à l’intérieur de laquelle se bâtissent de multiples formes, mais que le cinéaste, par ses dessins, ne montre pas. D’où une réflexion poussée de la part du spectateur, sommé d’imaginer tout ce qui est sous-entendu. Les diverses touches chromatiques se multiplient, mais toujours discrètes, sans violence, même dans les temps les plus orageux, car ce choix esthétique se veut serein, tout en douceur.

La tortue rouge

Lorsque l’Homme apparaît, le monde est déjà prêt à le recevoir : le sable accueillant d’une île des premiers temps; une forêt à la fois hospitalière et inquiétante; et le ciel, cet inconnu, aux nuages liquides et au bleu limpide. Et puis le jour et la nuit, la lune et les étoiles. Ce portrait idyllique et dans le même temps dramatique de la genèse se transforme en un conte philosophique (…)

Texte intégral
Séquences
Nº 306 (Janvier-Février 2017)
Page 4-5 (suivi d’une entrevue
avec le réalisteur)
En kiosque

Sortie : vendredi 27 janvier 2017
V.o. : sans dialogue
The Red Turtle

Genre :  ANIMATION – Origine : France / Belgique / Japon  – Année :  2016 – Durée :  1 h 21  – Réal. : Michaël Dudok de Wit – Dist./Contact :  Métropole.
Horaires :  @  Cinéma BeaubienCineplex

CLASSEMENT
Tout public

MISE AUX POINTS
★★★★★  Exceptionnel★★★★  Très Bon★★★  Bon★★  Moyen★  Mauvais½  [Entre-deux-cotes]  –  LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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