En salle

Trois visages

11 mars 2019

| PRIMEUR |
Semaine 10
Du 8 au 14 mars 2019

RÉSUMÉ SUCCINCT
Jafar Panahi conduit dans un village en montagne son amie, l’actrice Behnaz Jafari. La veille, celle-ci a reçu une vidéo troublante, montrant une adolescente de la région qui se pend parce que sa famille lui interdit de faire carrière dans le cinéma. Ayant quitté un tournage sans préavis pour tenter d’élucider cette affaire, la comédienne désemparée nie catégoriquement les prétentions de la jeune fille à l’effet qu’elle serait restée sourde à ses nombreux appels à l’aide, par texto et boîte vocale.

LE FILM
DE LA SEMAINE
| Élie Castiel |

★★★★

UNE HISTOIRE INVENTÉE

UNE VOIX ESSENTIELLE non seulement de la cinématographie iranienne, mais également du cinéma mondial. Parce que l’approche esthétique et narrative de Jafar Panahi remet en question la notion même de l’acte de tourner comme on peut dire l’acte d’écrire. S’intégrer dans une fiction qui n’en est pas une. Documentaire? Peut-être bien que oui. Ou mieux encore, donner au cinéma un nouvel élan qui brise les codes de la tradition tout en étant accessible. Pour une simple raison : il s’agit de cinéma iranien, celui qui donne la parole à toutes les classes sociales confondues.

Et c’est tourné dans un village, là où le temps semble s’être arrêté. Les us, les coutumes, l’éternel patriarcat, la femme et ses limites qu’elle n’ose combattre. Et l’étrangère, la vraie Behnaz Jafari, que tous les villageois reconnaissent puisque vedette du petit écran, présente pour régler une étrange affaire concernant une jeune fille rebelle. Et au beau milieu de cette histoire peut-être inventée, la présence indicible d’une ancienne vedette du cinéma iranien d’avant la révolution qui a préféré l’anonymat et dont un plan presque final souligne la résilience, la résignation face à un univers aussi complexe que mobilisé par le temps. Il ne reste qu’une toile blanche, là où… mais pas celle du cinéma.

Jafar Panahi, la brebis galeuse du cinéma iranien. Pour le meilleur et jamais pour le pire, promulguant en filigrane une critique de son pays. Avec humour, savoir-faire, maturité et plus que tout, en favorisant les images comme arsenal contre toute censure ou atteinte à la pudeur, c’est-à-dire cette pureté de faire du cinéma en liberté, même un tant soit peu restreinte. La mise en abyme n’a jamais paru aussi circonstancielle que d’à-propos.

Le Jafar Panahi de Trois visages est un chasseur d’images, de plans qui respirent autant le symbole que la prise en charge d’une meilleure vie possible. On nage entre le rire et la gravité espiègle de certaines situations, entre le charme décadent des traditions et la supériorité pourtant capitale de voir le monde autrement. Et Panahi, l’acteur, demeure intentionnellement distant, sans aucune charge d’émotion, procurant au film une neutralité qui se conjugue au passé et particulièrement au présent

Jafar Panahi, la brebis galeuse du cinéma iranien. Pour le meilleur et jamais pour le pire, promulguant en filigrane une critique de son pays. Avec humour, savoir-faire, maturité et plus que tout, en favorisant les images comme arsenal contre toute censure ou atteinte à la pudeur, c’est-à-dire cette pureté de faire du cinéma en liberté, même un tant soit peu restreinte. La mise en abyme n’a jamais paru aussi circonstancielle que d’à-propos.

FICHE TECHNIQUE

Sortie
Vendredi 8 mars 2019

Réal.
Jafar Panahi

Origine(s)
Iran

Année : 2018 – Durée : 1 h 41

Genre(s)
Docufiction

Langue(s)
V.o. : farsi; s.-t.a. & s.-t.f.

3 Faces / Se rokh

Dist. @
Eye Steel Films

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

Info. @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Musée
Cinéma du Parc

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel.  ★★★★ Très Bon.  ★★★ Bon.
★★ Moyen.   Mauvais. 0 Nul.
½ [Entre-deux-cotes]

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