En salle

Genèse

14 mars 2019

| PRIMEUR |
Semaine 11
Du 15 au 21 mars 2019

RÉSUMÉ SUCCINCT
Alors que sa relation de couple bat de l’aile, Charlotte tombe sous le charme de Théo, un musicien volage rencontré dans un bar. Guillaume, élève dans un pensionnat, est secrètement épris de son meilleur ami Nicolas et désire se rapprocher de lui. Au camp de vacances, Béatrice et Félix vivent leur premier amour.

CRITIQUE
| Guillaume Potvin |

★★★  ½

LE LANGAGE DE L’AMOUR

Premier coup de foudre. Première déclaration d’amour. Première peine d’amour. Trois histoires qui se chevauchent, s’emboîtent et se succèdent. Trois histoires où l’amour adolescent est à la fois sincère, pure, naïf, maladroit, tragique et surtout exacerbé par la nouveauté des circonstances.

Ces tumultes émotionnels de la fleur de l’âge forment un terrain fort fertile pour Philippe Lesage. Comme il nous l’aura fait remarquer dès sa première fiction, Les démons (2015), une des œuvres les plus étonnantes de la filmographie québécoise récente, le cinéaste saisit bien les manières par lesquelles l’environnement social et naturel peut paraître fort différent à travers les yeux des enfants. Si Lesage et son DP Nicolas Canniccioni captent les idiosyncrasies de ces jeunes regards avec une justesse désarmante, les distorsions de perspective de la jeunesse ne sont pas que d’ordre visuel; elles affectent aussi et surtout la formation de leur conceptualisation du monde qui les entoure, les relations sociales qui l’animent et les rapports de forces qui le déterminent. Le drame commun de Genèse, tout comme Les démons avant lui, est essentiellement celui-là : l’inéluctable choc entre les gestes autodéterminants des protagonistes et l’entendement divergent de leur entourage face à ceux-ci.

… les terrains sondés par Genèse et Les démons rappellent ceux de Laurentie de Mathieu Denis et Simon Lavoie (2011) dans la mesure où ces œuvres dépistent toutes la même violence (sexuelle) latente qui habite l’homme québécois.

Prises individuellement, les trois parties du film dressent un éventail des hauts et des bas émotionnels de l’adolescence. Mais la construction formelle et les choix esthétiques inusités laissent présager qu’il y a anguille sous roche. La multiplication des dialogues significatifs en anglais, les nombreuses références à l’histoire (le Rapport Durham) et à la culture anglo-saxonne (The Smiths, J.D. Salinger), le floutage des repères historiques laissent tous sous-entendre une inquiétante fatigue culturelle. La langue française, réservée à l’intellectualisation de l’affect — pensons aux monologues machistes livrés brillamment par Paul Ahmarani — ainsi qu’aux banalités quotidiennes ne semble plus apte à exprimer les sentiments véritables.

À ce titre, les terrains sondés par Genèse et Les démons rappellent ceux de Laurentie de (Mathieu Denis et Simon Lavoie (2011) dans la mesure où ces œuvres dépistent toutes la même violence (sexuelle) latente qui habite l’homme québécois. Ce bouillonnement de crise identitaire et de masculinité toxique crée une situation propice au surgissement de prédations de toutes sortes. Les plus vieux profitent des plus jeunes, les hommes abusent des femmes; toutes ces violences se jouent dans l’angle mort d’une jeunesse inconsciente de la logique de domination qu’on lui inculque. Comme va la chanson, si « j’ai vendu ma blonde », c’est bien car « pour boire, il faut vendre ».

FICHE TECHNIQUE

Sortie
Vendredi 15 mars 2019

Réal.
Philippe Lesage

Origine(s)
Québec [ Canada ]

Année : 2018 – Durée : 2 h 11

Genre(s)
Drame

Langue(s)
V.o. : français, anglais / s.-t.a. & français
Genesis

Dist. @
FunFilm

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

Info. @
Cinéma Beaubien
Cinéma du Musée
Cinéma Moderne
Cineplex

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel.  ★★★★ Très Bon.  ★★★ Bon.
★★ Moyen.   Mauvais. 0 Nul.
½ [Entre-deux-cotes]

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