En salle

Félicité

25 octobre 2018

| PRIMEUR |
Semaine 43
Du 26 octobre au 1er novembre 2018

SYNOPSIS SUCCINCT
Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo, Félicité chante dans un bar et tire de ses spectacles de modestes revenus. Cette célibataire indépendante habite un petit logement avec son fils adolescent. Lorsque celui-ci est victime d’un grave accident de moto et qu’il doit subir une opération coûteuse pour éviter l’amputation d’une jambe, elle sollicite l’aide financière de son entourage.

CRITIQUE
| Élie Castiel |

★★★★ ½

MAMA AFRICA

Le Franco-sénégalais Alain Gomis signe une œuvre puissante, majestueuse, tableau à la limite d’un surréalisme jonché entre le ritualiste et le clairvoyant qu’illustrent, respectivement, ces quelques interventions chorales d’œuvres classiques et des séquences nocturnes où les sons de la forêt, le bruit des bêtes qu’on devine et la physicalité de divinité africaine de Félicité donnent le ton et explique la grandeur et la dynamique tribale d’un continent originel.

Félicité, c’est un prénom qui représente la joie, mais qui ici place la principale intéressée dans le rang de femme fatale, sorcière, d’esprit indépendant, de mère merveilleuse, qui ne se laisse pas avoir par les hommes. Félicité n’est pas un film féministe, mais au féminin, sur le sexe faussement « faible », car c’est lui, l’Homme, l’inconstant.

Les hommes, justement, sont montrés comme des fantômes urbains, soit déambulant dans les rues des favelas de Kinshasa que dominent au fond les hautes tours des quelques nantis ou passent leur nuit dans un bar, à boire ou avec des filles faciles de passage.

Pour Gomis, l’Afrique a mal. La fin de la colonisation belge a sans doute transformé ce pays en « république démocratique », mais les reliquats, oui, reliquats de l’ancienne administration sont restés : divisions disproportionnées des classes sociales, débrouille pour s’en sortir (comme cette vieille dame, à la mine et au visage pourtant dignes qui, à l’hôpital, n’est jamais retourner remettre les médicaments à Félicité). Il ne s’agit pas ici de vivre, mais de survivre. Tous les coups sont permis. Et Alain Gomis les présente non pas avec indignation, mais une rage au cœur désespérée, le cinéma se chargeant de donner vie à ces revendications sociales, politiques, affectives et le plus souvent sourdes.

Il ne s’agit pas ici de vivre, mais de survivre. Tous les
coups sont permis. Et Alain Gomis les présente non pas avec
indignation, mais une rage au cœur désespérée, le cinéma se
chargeant de donner vie à ces revendications sociales,
politiques, affectives et le plus souvent sourdes.

L’Afrique sera l’Afrique et les adultes s’appellent entre eux Mama ou Papa, comme s’ils étaient les protecteurs des nouvelles générations (symbolique du fils de Félicité). Mais c’est Mama, la mère nourricière qui domine, forte, combattante, ouvrant son cœur à un nouveau continent qui affiche progressivement ses couleurs. Avec Félicité, Gomis a construit un film, noble, amoureux de la terre et des gens, tableau d’une Africanité en devenir dont on ne peut saisir l’âme que si on comprend sa dynamique. Originaire d’Afrique du Nord, je suis bien placé pour saisir les quelques rudiments de cette Afrique qui échappe au reste du monde. Ne serait-ce que ce secret qui se cache à l’intérieur de chaque individu, ce rapport inconditionnel et désintéressé à la terre. C’est déjà quelque chose d’acquis. Et puis, comment ne pas souligner la présence de Véro Tshanda Beya. Elle illumine l’écran, inspire par sa sagesse naturelle et nous fait la grâce d’une dernière séquence d’une puissante émotion.

Sortie
Vendredi 26 octobre 2018

Version originale
français, lingala ; s.-t.f.
Félicité


Réal.
Alain Gomis

Genre
Chronique sociale

Origine
France / Belgique

Sénégal / Allemagne
Liban

Année : 2016 – Durée : 2 h 04

Dist.
Mustafa Kemal Uzuner
[ Europa Distribution ]

Horaires & info. @
Cinéma du Musée

Classement
Tous publics

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul
½ [Entre-deux-cotes]

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