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Martha Graham Dance Company

23 février 2018

CRITIQUE
| DANSE |

★★★★
ENTRE LA DISTINCTION ET LA SYMÉTRIE
Élie Castiel

Martha Graham revit dans un bref extrait vidéo qui confirme ses parallélismes évidents et fondateurs avec Isadora Duncan, et en même temps expose triomphalement leur rivalité, La première, technique et inspirée, la seconde, romantique et endiablée. Mais un dénominateur commun les rassemble : l’engouement pour une chorégraphie puisant aux formes antiques, notamment dans les mouvements, des bras surtout, comme des lamentations offertes aux Dieux; et les costumes de coryphée, emprisonnant sensuellement le corps; et son espace unique au milieu de la scène, comme protégée par les divinités des déités.

Dans le répertoire varié présenté à la soirée Danse Danse, les disciples contemporains de la célèbre chorégraphe assument ces particularités par le biais de moments intenses, tant par les gestes que par la musique, stridente, imitant souvent les battements du cœur, s’immisçant dans notre esprit afin qu’il puisse retenir les tonalités les plus vertigineuses.

PeiJu Chien-Pott (Ekstasis) — Photo : © Brigid Pierce

Le corps des danseurs, et surtout des danseuses, se présentent comme des sculptures taillées sur le marbre; travail gigantesque de « mise en mouvement » qui, pour la circonstance, offre aux spectateurs un retour mythique vers le passé.

La danse moderne n’est pas née aujourd’hui, même si de nos jours, elle ressemble plus à de l’athlétisme que toute autre chose. Antithèse du ballet classique, le style Graham offre à son époque une contemporanéité authentique empruntant à l’instinct, à l’impulsif, mais toujours contrôlé grâce une prise en charge intellectuelle et intransigeante. Et particulièrement architecturale dans sa forme.

La Martha Graham Dance Company propose
une soirée marquée du sceau de l’intemporalité.

Aucun mouvement gratuit, aucune dissension d’ordre technique, mais une symétrie qui ressemble à la construction d’un édifice chorégraphique. Les solos dominent, l’espace dansé entre chaque intervenant se confirment sans cesse et, ultimement, lors des rapprochements des corps, le tout s’embrase dans une sorte de communauté faite de chair et de sens.

La finale, Mosaic, est signée du grand Sidi Larbi Cherkaoui qui prend le courage de la mettre en musique avec des chants hébreux. Le Moyen-Orient n’est plus une terre de conflits entre Juifs et Musulmans, mais le territoire pacifique des trois religions monothéistes. De mère flamande et de père marocain, sa double appartenance le situe dans le panthéon de l’entente universelle.

La Martha Graham Dance Company propose une soirée marquée du sceau de l’intemporalité.

Chorégraphies : Martha Graham (Chronicle), Doug Varone, Aszure Barton, Larry Keigwin (Lamentations Variations) Martha Graham, revue par Virginie Mécène  (Ekstasis), Sidi Larbi Cherkaoui (Mosaic) – directrice artistique : Janet Eilber – danseurs : Membres du corps de ballet de la Martha Graham Dance Company – diffusion :  Danse Danse.

Repésentations
23 et 24 février 2018
20 h / Place des Arts (Théâtre Maisonneuve)

Durée
1 h 45 (incl. entracte).

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel★★★★ Très Bon★★★ Bon★★  MoyenMauvais.. ½ [Entre-deux-cotes]

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