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École nationale de cirque 2017

25 mai 2017

ESPACE CIRCASSIEN /
CRITIQUE

L’amour et les extraterrestres
★★★ ½
Texte : Élie Castiel

L’ÊTRE ET LE PARAÎTRE

Didier Lucien a voulu créer intentionnellement un spectacle plus rassembleur, voulant que les amateurs de cirque et les autres se retrouvent dans un espace unique où ils pourraient convoler en justes noces.

Quand Cirque et Extraterrestres tentent de vivre ensemble, il peut se produire des étincelles pas toujours scintillantes, mais se promenant un peu partout au bon gré des artistes et des pièces musicales choisies. Si vers la fin le O mio babbino caro est vite expédié en quelques rapides secondes, sous le rire de quelques spectateurs mal informés de la chose, force est de souligner que les musiques plus commerciales et connues disposaient de plus de temps.

CIR_L'amour et les extraterrestres

Tuedon Ariri© École nationale de cirque / Montréal

Car le cirque, et surtout en ce qui a trait à l’École nationale du cirque, la musique est un point fort du spectacle, l’élément de mise en scène qui appuie l’effort physique, donne la motivation et permet au corps, autant masculin que féminin, de dégager une sensualité. Car le spectacle de cirque est jusquement une représentation qui dépasse la réalité et non seulement un rituel de passage.

Trop de morceaux musicaux choisis, mais bien intégrés dans l’ensemble. Les artistes autant que les spectateurs sont comblés. Soulignons cette finale à la sauce Théâtre des variétés qui surprend autant qu’il remet en question le phénomène actuel de spectature. Points de jeunes et de vieux, mais un amalgame d’auditoire de tout âge qui admire, tous deux complices de ce qui se passe sur scène.

Les main à main sont subtilement exécutés. Les différentes cordes lisses trop omniprésentes, et le cerceau aérien, ainsi que le cadre russe tout à fait réussis. On en sort totalement satisfait car en plus du spectacle, on admire ses corps jeunes, sculpturaux, aux formes impeccables dont elles autant qu’eux ont le tour (et elles/ils sont tout à fait conscient(es) de transformer pour qu’en émergent sensualité et érotisme. Quant aux quelques extraterrestres, en carton-pâte mal assorti, on aurait pu s’en passer, quitte à inventer quelque chose de plus terre-à-terre. Mais dans l’ensemble, cela ramenait parfois au très bon spectacle de cabaret (tout public) plutôt qu’au regret d’une promesse non tenue.

Hangar des possibles
★★★★ 
Texte : Élie Castiel

NOCTURNE

Le déroulement, la deuxième soirée, assumait pleinement son côté Cabaret ; donc, à prendre ou à laisser. Je me place définitivement parmi les « preneurs » puisque ce côté nostalgique, cette mélancolie qui nous perce parfois l’âme, tous ces éléments sensibles de notre for intérieur  a, pour une des rares fois, droit de cité.

Ça évoque aussi le film et la pièce Cabaret de Bob Fosse ; ça renvoit directement à des fantasmes que pourrait avoir Yves Dagenais, fièrement conquis par sa mise en piste, mélée allègrement de mise en scène. Car il s’agit de deux éléments de la représentation qui, plutôt que de compétitionner, s’assemblent, souvent se ressemblent et finissent par nous jouer des tours fort inattendus.

Hangar des possibles

Quentin Greco (cerceau chinois) — © Roland Lorente

Comme ce numéro de drag queens et drag kings plus spirituels que vulgaires (Mado à la sauce non improvisée) et qui fait fi des jeunes spectateurs. Bon, on ne les blâmera pas, surtout pas moi ! Ce curieux épisode passé, tout ce qui se passe sur piste nous procure une sorte d’adroit mélange de peur, d’inquiétude et de fascination. Les couples (pas de deux) femme-femme, homme-homme et homme-femme, dans les deux spectacles, sont devenus la norme. Nous devons souligner l’importance du parti pris de la part des metteurs ou metteuses en piste. C’est voulu. Il y a là une déclaration d’amour et d’appui à la diversité sexuelle. Et que dire que parmi les artistes, ces différences se font sentir admirablement bien. On n’en sort que plus contents.

Et entendre le Bernard Hermann de Taxi Driver ou le Angelo Badalamanti de Twin Peaks dans L’amour et les extraterrestres, ou encore la valse d’Eleni Karaindrou dans L’Apiculteur de Theo Angelopoulos ou Nina Simone, à la voix voluptueuse, dans Hangar des possibles, toutes ces énergies musicales nous prouvent jusqu’à quel point la musique est essentielle à tout art de la représentation.

Représentations : En alternance,  jusqu’au 4 juin 2017,  à la TOHU.

MISE AUX POINTS
★★★★★  Exceptionnel. ★★★★  Très Bon. ★★★  Bon. ★★ Moyen. Mauvais. ½ [Entre-deux-cotes]

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