En salle

Écartée

29 septembre 2016

RÉSUMÉ SUCCINCT
Anick tourne un nouveau projet sur la réinsertion sociale des détenus québécois. Pour mener à bien son étude, elle choisit de brosser le portrait de Scott, ex-criminel récidiviste dans la cinquantaine, libéré depuis sept ans.

ecartee

CRITIQUE
★★★★
Texte : Élie Castiel

L’INDISCRÈTE

La première docufiction de long métrage de Lawrence Côté-Collins est filmée à l’état brut, primaire, sans concessions et, volontairement, de façon frontale, moins pour agacer que pour proférer une sorte de déclaration (le mot statement, en anglais, est plus fort) sur un certain état du cinéma. Évocateur, à titre d’exemple, d’un certain cinéma de Robert Morin, Écartée souligne son titre à gros traits en caractère gras tant sa signification partage un double sens :  d’une part, une caméra prise entre la liberté de tourner et la prise de conscience morale de s’infiltrer dans la vie d’un couple hors-norme ; de l’autre, un personnage, Annick (alter ego de la réalisatrice), déchirée (même si ça ne paraît pas trop) entre une attirance enver Jessie, la femme du couple, et la tentation de braquer sa caméra pas uniquement sur des personnages et des lieux, mais surtout sur une notion indicible, invisible à l’œil : jouer la vérité.

Écartée respire profondément la liberté de filmer
sans retenue et confirme une cinéaste magistralement
indisciplinée, d’une éthique exemplaire face à son
médium et en fin de compte, en dialogue harmonieux
et sans filtre avec les images en mouvement.

Film-puzzle (comme ces casses-têtes en 3D de Scott), Écartée est l’une des plus belles surprises de l’année en matière de cinéma indépendant québécois. L’humour débridé et pince-sans-rire, l’improvisation assumée, la refus de direction d’acteurs, filmer la dérive d’un couple sans se préoccuper du caractère instrus de la caméra, autant de gestes de bravoure d’une cinéaste qui carbure cinéma et en demande plus.

Sa propre direction photo assume son parti pris : lors des ébats sexuels entre Jessie et Scott, le baiser est absent, le rapport sexuel est « exécuté à reculant », comme si l’acte intime, surtout pour Scott, était simplement un geste biologique dénué de toute émotion. Cela sera  souligné par la réponse qu’il donne lorsque  la cinéaste dans le film lui demande de parler de sa vie sexuelle en prison (un des plus beaux moments qui dénote une hétérosexualité exacerbée).

Entre celui proche de la cinquantaine (Ronald Cyr, qui conserve son vrai nom) et Jessie, la motié de son âge (exemplaire Whitney Lafleur), une relation à la limite de l’inceste prise par une caméra qui ne cesse de s’infiltrer pratiquement à l’intérieur des personnages.

Écartée respire profondément la liberté de filmer sans retenue et confirme une cinéaste magistralement indisciplinée, d’une éthique exemplaire face à son médium et en fin de compte, en dialogue harmonieux et sans filtre avec les images en mouvement.

Sortie : vendredi 30 septembre 2016
V.o. :  français

Genre : DRAME – Origine : Canada [Québec] – Année :  2016 – Durée :  1 h 20  – Réal. :  Lawrence Côté-Collins – Int. :  Marjolaine Beauchamp, Ronald Cyr, Whitney Lafleur –   Dist. / Contact :  Les Films du 3 mars.
Horaires :  @   Cinéma Beaubien

CLASSEMENT
Interdit aux moins de 13 ans
(Érotisme)

MISE AUX POINTS
★★★★★  Exceptionnel★★★★  Très Bon★★★  Bon★★  Moyen★  Mauvais½  [Entre-deux-cotes]  –  LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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