En salle

Je suis à toi

10 septembre 2015

RÉSUMÉ SUCCINCT
Henri, un boulanger belge sexagénaire, tombe amoureux de Lucas, un jeune prostitué argentin, qu’il fait venir pour partager son lit et l’aider dans la boulangerie. Comme il n’est pas payé, le garçon rue dans les brancards. De plus, il n’est pas homosexuel et semble plutôt intéressé par Audrey, une jeune veuve, mère d’un enfant, qui travaille au comptoir.

Je suis à toi

LE DIABLE AU CORPS

Élie Castiel
CRITIQUE
★★★★

Les hasards, souvent imparfaits, de la distibution, font en sorte que nous ne découvrons ce film (présenté l’an dernier au Festival du nouveau cinéma) qu’avec un certain retard. Toujours est-il qu’après le très beau et lucide Hors le murs (voir ici), le réalisateur belge David Lambert poursuit sa thématique sur les amours homosexuelles en l’imprégnant cette fois-ci d’une aura d’étrange et lumineuse magie.

Cela s’explique par le côté manifestement marginal des personnages, des individus écorchés en quête d’amour, d’inspiration, de bonheur, de liberté. Pour arriver à leurs fins, des gestes extrêmes, des caresses intimes qui assument leurs différences, des mots qui blessent autant qu’ils expriment la tendresse et l’amour.

La caméra de Johan Legraie ne subit aucune censure
et s’intègre comme une participante aux jeux corporels
des protagnonistes. Plutôt que de provoquer, le cinéaste
normalise la passion et la quête de l’amour quelle
que soit l’orientation sexuelle des personnages.

C’est aussi un film sur le rapprochement charnel, sur le corps et ses multiples variations, sur une autre façon d’envisager l’affect. Cette histoire de trio infernal aux bords de l’abîme suggère paradoxalement une vision tout de même assez pudique de la vie : simplement aimer et se faire aimer. David Lambert ose et prend le soin de nous faire entrer dans son univers particulier.

Avec Je suis à toi, titre on ne peut plus romantique, le cinéma homosexuel s’affranchit, assume sa condition affective, s’en fout carrément du qu’en-dira-t’on et envoie un message clair et précis. La caméra de Johan Legraie ne subit aucune censure et s’intègre comme une participante aux jeux corporels des protagnonistes. Plutôt que de provoquer, le cinéaste normalise la passion et la quête de l’amour quelle que soit l’orientation sexuelle des personnages.

Petit de taille, pas nécessairement beau d’un point de vue classique, le jeune acteur argentin Nahuel Pérez Biscayard possède une aura de sensualité qui tranperce l’écran. Son jeu est naturel, obsédant, d’une physicalité radieuse. Jean-Michel Balthazar, quinquagénaire transi d’amour, au physique ingrat selon les normes dictatoriales de la société, donne à son personnage quelque chose de paternel et de romanesque. Et puis la muse dolanienne Mona Chokri qui, ici, s’intègre avec aisance à un autre univers.

Aucune recherche du vedettariat entre ces trois personnages, mais un geste complice, un code éthique qui consiste à immortaliser certains moments de cette belle histoire d’amour. La partition sonore s’impose sans crier gare, rendant certains passages fortement agréables et nostalgiques. En fin de compte, Je suis à toi est une histoire romantique qui donne à la différence ses lettres de noblesse. Et ce qui étonne en fait, c’est que le réalisateur le fait avec un sans-gêne contagieux, sans rien devoir à justifier.

revuesequences.org

Sortie : vendredi 11 septembre 2015
Version originale : anglais, espagnol, français
S.-t.f. > Je suis à toi

Genre : Drame sentimental – Origine : Canada / Belgique – Année : 2014 – Durée : 1 h 43 – Réal. : David Lambert – Int. : Nahuel Pérez Biscayard, Jean-Michel Balthazar, Monia Chokri, Achille Ridolfi, Anne Marie Loop, Augustin Legrand – Dist. / Contact : Filmoption.
Horaires : @ Excentris

CLASSIFICATION
Interdit aux moins de 16 ans
(Érotisme)

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. Mauvais. ½ [ Entre-deux-cotes ] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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