En salle

Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence

2 juillet 2015

RÉSUMÉ SUCCINCT
Portraits de quelques humains pas comme les autres et dans le même temps ressemblant étrangement à leurs contemporains.

LE FILM DE LA SEMAINE
LION D’OR (Roy Andersson)
Mostra de Venise 2014

Un pigeon perché..._En salle

UNE LEÇON D’ESTHÉTIQUE HUMANISTE

François D. Prud’homme
CRITIQUE
★★★★★

L’œuvre qui clôt la trilogie des vivants du cinéaste suédois Roy Andersson est avant tout − et au même titre que les deux premiers volets : Chansons du deuxième étage (2000) et Nous, les vivants (2007) − une expérience esthétique cinématographique déconcertante. Rapidement identifiable dès les premières scènes par la plasticité froide et l’iconicité surréaliste de ses tableaux vivants, la cinématographie d’Andersson met en scène des personnages au teint blafard et à la mine abattue, à l’intérieur de plans-séquences au cadre fixe qui offrent une vision parfois triste et souvent apocalyptique d’une humanité en perdition, un point de vue on ne peut plus idiosyncrasique sur la complexité émotive et sensuelle de l’existence.

Le dernier volet au titre tout aussi évocateur que les deux premiers est, en qualité d’ex-voto offert aux divins amoureux du 7e art, l’aboutissement de plus de 15 ans de création réflexive qui s’exprime par le truchement d’un emprunt à l’œuvre incontournable de Cervantès. Sam et Jonathan, un couple de vendeurs itinérants qui vivent chacun à leur manière une crise existentielle, déambulent nonchalamment de tableau en tableau dans un monde onirique près de l’effondrement, où passé et présent, humour et cynisme se côtoient dans une absurdité des plus beckettienne.

Rapidement identifiable dès les premières scènes par
la plasticité froide et l’iconicité surréaliste de ses tableaux vivants,
la cinématographie d’Andersson met en scène des personnages au
teint blafard et à la mine abattue, à l’intérieur de plans-séquences
au cadre fixe qui offrent une vision parfois triste et
souvent apocalyptique d’une humanité en perdition…

À titre d’exemple, une scène mémorable présente le roi Charles XII (reconnu pour son machisme et sa cruauté) rendant visite à un garçon de café dont il est tombé amoureux avant d’aller se faire massacrer par les Russes. Au retour de son armée de fantassins en déroute, le monde contemporain pleure la défaite et l’humiliation dans un pathétisme ridicule et significatif, le tout présenté dans un décor chenu et dépouillé qui a fait la réputation du cinéaste. L’humiliation est d’ailleurs la thématique qui traverse l’œuvre entière d’Andersson. Une humiliation touchante, qui frôle souvent l’humilité, mais qui affronte avec virulence et ironie l’austérité médusée des dirigeants et des mieux nantis. Bref, la philosophie du pigeon est vibrante pour qui aime réfléchir par le biais des images, en l’occurrence celles d’un grand maître du cinéma burlesque.

  revuesequences.org

Sortie : Vendredi 3 juillet 2015
V.o. : suédois
S.-t.f. > Un pigeon perché sur un arbre philosophait sur l’existence
S.-t.a. > A Pigeon Sat on a Branch Reflecting of Existence
Titre original > En duva satt på en gren och funderade på Hilvaron

Genre : Fable satirique – Origine : Suède / Norvège / Allemagne / France – Année : 2014 – Durée : 1 h 40 – Réal. : Roy Andersson – Int. : Holger Andersson, Nils Westblom, Viktor Gyllenberg, Jonas Gerholun, Lotti Törnros, Ola Stensson – Dist./Contact : EyeSteelFilm / Films We Like.
Horaires : @ Cinéma du ParcExcentris

CLASSIFICATION
Tout public

MISE AUX POINTS
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon. ★★ Moyen. Mauvais. ½ [ Entre-deux-cotes ] – LES COTES REFLÈTENT UNIQUEMENT L’AVIS DES SIGNATAIRES.

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